La Transhumance du Pape, Jeff Mills au LC (Nantes, 44) 03.03

8 min de lecture

Ce vendredi soir, 3000 brebis attendent leur berger dans La Cathédrale (LC). Monseigneur Jeff Mills est là en personne. Le Pape qui baptisa Francis Cabrel donne, donne et donne encore. Le Musicodrome l’a reçu et vous l’offre.


00h – 2h David Asko   https://soundcloud.com/dj-david-asko-official

2h – 5h Jeff Mills   www.residentadvisor.net/dj/jeffmills

5h – 7h PsyK   www.residentadvisor.net/dj/psyk


« L’accès au quai des Antilles sous une pluie fine rafraîchit les esprits qui n’appellent qu’à être réchauffés dans les macro-ondes de Jeff Mills. »

Ce vendredi soir, Nantes a la banane dans le Hangar du LC Club. L’accès au quai des Antilles sous une pluie fine rafraîchit les esprits qui n’appellent qu’à être réchauffés dans les macro-ondes de Jeff Mills. Les envies montent avant même d’entrer dans la salle. Le long de la Loire, on entend déjà des technophiles scander son nom. Cela ne présage que du bon. Nous nous laissons attirer doucement dans l’immense salle, toute ouverte pour l’occasion. Les organisateurs ont fait place ; comme pour nous dire “ce soir les enfants, on ne rigole pas, on gigue, on gambille, on chaloupe !”. Le soundsystem bodybuildé pour l’occasion ne fait que nous confirmer les signes avant-coureurs : ça va tabasser. Les auditeurs se massent déjà aux pieds du DJ qui ouvre le bal, David Asko. Les corps sont serrés pour encaisser la puissance de son set. Une accélération discontinue pour arriver très vite (très très vite) sur du 130 bpm percutant. Nous tentons de nous frayer un chemin dans la foule déjà déchaînée, ça joue des coudes, les yeux fermés, les bras en l’air, comme pour s’emparer de la musique, l’accueillir.

Pour prendre plus de recul et un peu d’air, une estrade à l’arrière de la fosse aux lions s’enivre dans une densité légèrement moindre. Mais ce n’est que le début des festivités, celle-ci aussi se remplit vite. Il faudra aller chercher de l’oxygène un peu plus haut, sur les balcons qui encerclent le parterre. N’en déplaise à l’instinct de survie, le corps est attiré indubitablement devant les enceintes, on descend les escaliers pour se rapprocher, sans même s’en rendre compte. David Asko déroule son set avec maîtrise, il gère sa horde et ne lui laissera aucun répit, pas une seconde avant qu’il ne doive céder sa place à Jeff. Avec deux heures d’une grande qualité qui ont chauffé le public à blanc, il laisse s’installer le Pape de Détroit dans la meilleure des conditions.

« Le Détroitien ne fait pas de détour, il trace tout droit dans la forêt sonore, les contours de la torgnole. »

Il nous met les cloches autour du cou et que ça boulègue jusqu’aux zones de pâtures. On traverse les ruisseaux, on gravit les montagnes, le berger chauve nous promène dans des contrés dont lui seul connaît les chemins. Arrivés sur un plateau désertique, en plein cagnard, les plus sensés enlèvent leur costume de papier pour transpirer à l’air libre. Ils n’ont jamais appris à se battre contre des poupées alors ils leur tirent la langue, les embrassent et les font tourner comme un soleil dans l’arène-claude. Dans cette chambre noire, ils ne sont pas très patients. Ils se souviennent de l’Andalousie, de ces prairies bordées de Cactus qu’ils aiment tant goûter. Ils traversent le troupeau à la recherche de leur moitié. Ce qu’ils ne savent pas, c’est qu’ils ont 13 moitiés. Pendant ce temps là, Jeff Mills donne les directives d’une transe immense des basses plaines vers les alpages. Alors on grimpe sans casque et à grand coup de cornes dans le gosier, la montagne du son. L’appel de la forêt résonne dans les poutres métalliques. Le mat adore, la reine de Saba, les couilles du taureau. Est-ce que ce monde est sérieux ?

A peine les cloches ont fini de sonner que les basses continuent de frapper. Sous les applaudissements nourris qui continuent d’accompagner la sortie de Jeff Mills, Psyk s’installe pour finir le travail. Le LC Club se vide et permet aux nombreux résistants de gagner beaucoup d’espace et un peu d’air…malheureusement pas pour longtemps. Alors que PsyK tambourine sur un système son toujours aussi puissant, les corps dansent, librement. Quelques visages hagards aux mâchoires contractées parsèment les rangs de la foule, comme pour rappeler que le 5-7h des soirées techno est celui des plus passionnés qui poussent le corps pour dépasser l’usure. Paradoxe toujours surprenant de cet amour destructeur, presque inhérent au concept même de la fête.

« un plaquage cathédrale à faire pâlir William Servat et un caramel à rendre jaloux Jean-Marc Mormeck »

Dans une conclusion de folie, un vent de stupeur souffle sur le LC Club quand beaucoup se retrouvent la gorge piquée par un lacrymogène dispersé. On se rue alors vers la sortie où un autre événement épique sonne le glas de la fête : un homme fonce en voiture dans les barrières de sécurité, bien décidé à se venger de son ébriété. Après avoir admiré un plaquage cathédrale à faire pâlir William Servat et un caramel à rendre jaloux Jean-Marc Mormeck, on s’évade le long des quais de Loire, sous la pluie fine nantaise. Une sèche pour se réchauffer. Les guibolles bien échauffées. Les tympans délectés.

Tetex – Clem – Julius

Les Bincheux

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