Marianne Aya Omac au festival Détours de Chant (Launaguet, 31) 25.01

8 min de lecture
Marianne Aya Omac - Maire de Launaget - By Etienne Colombo
Marianne Aya Omac

Dans le cadre du festival Détours de Chants, le Musicodrome avait été invité au concert de Marianne Aya Omac. Chanteuse, guitariste, parfois même trompettiste, elle était accompagnée de son bassiste Benjamin Etur et de son percussioniste, François “Fanfan” Miniconi.

L’horloge affiche vendredi soir lorsque nous pénétrons dans la salle des fêtes de Launaguet. L’ambiance est familiale, accueillante, bienveillante, pourtant les regards qui pétillent nous font comprendre que l’événement est assez inhabituel ici. Marianne Aya Omac, ou celle qui a fait The Voice. “Qu’est-ce qu’elle vient faire à Launaguet ?” autodérisionnera-t-elle même en fin de concert.

Sans filtre, mais avec son sourire, elle se présente à nous, entourée de ses deux acolytes du soir, Benjamin et Fanfan. Ils sont habillés sobrement, confortablement, comme pour nous dire “Ce soir, on est entre nous, détendez-vous, éclatez-vous, régalez-vous”. Et cette ambiance transparaît dès la première chanson. On attaque en haut d’une montagne, dans une grotte. Mais rapidement, le voyage s’engage, l’histoire commence. Une histoire d’égalité, d’humanité, une histoire Homme Femme. Le propos est engagé, le rythme est soutenu, la plume est subtile.

 

Marianne n’a pas peur du public, ne se construit pas de fausse identité, de carapace artistique, de barrière pour tenir le public à distance. Elle se présente à nous telle qu’elle est vraiment, sans prétention ni fausse modestie. Sans bâcler la présentation de ses partenaires, elle fait de chaque interlude un divertissement, un réel moment de partage au  sein d’une résistance collective et pacifique. Marianne a bien compris qu’On récolte ce que l’on Sème, alors elle se donne, elle nous donne sans modération. Pour transporter un public il faut l’attraper où il est en arrivant au concert, alors Marianne nous réveille, et nous secoue progressivement les épaules. Façon Salut à toi! des Berrurier Noir, elle nous dresse la liste son village, ses origines, elle nous dépeint ses racines. Et lorsque les mots ne suffisent plus, c’est la musique qui s’en charge, pour transpercer le public et le faire frissonner.

Après des siècles où j’ai tout reporté sur l’autre, je me suis rendue compte que le pire c’est quand je me laisse moi-même

Le public croit qu’il a compris la soirée, mais Marianne a un coup d’avance. Avec Quand tu me Laisses, elle nous plonge dans un bain d’émotion et d’introspection inattendues. Puissante, juste et poétique, elle nous prend par la main, nous montre le paysage, nous accompagne pour la suite du voyage. Avec Aïe Aïe Aïe et Nobody Cares for Congo, c’est du monde dont elle fait un portrait pessimiste, pourtant si réaliste. Mais l’espoir est au sein de sa musique, de ses chansons, rejaillit plus brûlant que jamais De l’Autre Côté de nos œillères occidentales, de la part de ceux qui “osent croire encore à une autre vie, quel qu’en soit le prix”.

L’amour des enfants ne tourne jamais à l’envers

Anselm Grün dit Seul celui qui est réconcilié avec lui-même peut également se réconcilier avec les personnes de son entourage”. Lui faisant écho, Marianne Aya Omac, dit “J’ai rencontré quelqu’un de formidable. C’est moi”. Ce voyage est spirituel et elle nous y convie, à notre plus grand plaisir. L’ambiance est rouge/jaune, et le public est prêt à être transporté. Alors commence l’espagnol, et Marianne nous invite en elle, dans un En Mi majeur de sa performance. Fanfan passe au Cajón, Benjamin ne s’arrête plus de sourire, les trois musiciens se surprennent de complicité et nous entraînent avec eux dans cette “énergie musicale”. Marianne termine ses chansons d’un geste de la main, lent et intense, comme pour les accompagner vers leur dernier souffle, pour les aider à s’endormir.

Espagnol.e.s nous sommes, espagnol.e.s nous resteront encore un peu, sur Duele et Llorona de Montreal. De quoi découvrir la femme trompette, de quoi s’émerveiller devant cette performance buccale incroyable d’authenticité. Faire la trompette avec la bouche, on a tous essayé. Marianne a travaillé jusqu’à réussir. Il est l’heure pour elle de nous parler de son passé, de The Voice et de donner une “Olé” Masterclass à un public plus hispanique que jamais Launaguet n’en a vu. La spiritualité toujours au coin de la parole, elle nous livre Pura Mentira d’un Pierre Rabhi paré pour l’occasion d’un sombrero. Pierre à ses côtés, elle hèle le public, apostrophe l’humanité lui sommant de se ressaisir, d’arrêter de se mentir !

Mais dirigeant le rythme d’une main de fer dans un gant de velours, Marianne laisse cette effusion s’éclipser en même temps que Benjamin et Fanfan, pour se retrouver seule en scène et nous proposer un temps calme, que nous espérions inconsciemment voir apparaître. Viennent le poème de Françoise, Je Reviens et d’une jeune Marianne, La Mouche.

C’est le propre des concerts réussis, lorsque le public profite des chansons ET rencontre l’artiste qui se cache derrière. Et alors, d’un recul incroyable, Marianne nous propose de nous mettre nous-mêmes en autodérision, lors d’un monologue improvisé “Dans la tête de mon public”. Charmant d’humour, doux et vrai à la fois, Marianne nous câline de ses blagues et de ses bons mots.

Les rappels verront apparaître un dernier message de tolérance, en adéquation totale avec ce qu’elle incarne et la soirée à laquelle nous venons d’assister. Weak and Strong, fragile et fort à la fois. Comme nous sommes tous et toutes. Merci à toi Marianne, tu es une belle personne et nous sommes ravis d’avoir croisé ta route.

Crédits photos : Etienne Colombo

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