Cela fait déjà 10 ans que l’Abbé Pierre est parti en grandes vacances. A l’occasion de ce triste départ, les communautés Emmaüs des Bouches du Rhône comptaient bien continuer la lutte à Marseille (13) samedi dernier dans le cadre d’un forum-concert de soutien avec tous ceux qui se mobilisent contre la misère et le mal-logement. Motivés et HK ont choisi de participer aimablement à cette soirée.
Il y a des combats qui, malheureusement, ne tarissent pas. Alors que de nombreuses villes de l’hexagone ont activé leur plan Grand Froid, cette soirée nous rappelait que même près de 70 ans après avoir fondé le mouvement Emmaüs, rien n’a vraiment changé. Pire, la situation s’est même aggravée où la société française s’est précarisée avec des inégalités qui ne cessent de se creuser. Pour cette soirée marseillaise, Le Musicodrome a donc choisi de ne pas se faire accréditer et c’est donc en signe de soutien que ce live report ne sera pas illustré avec des photos de cette chouette soirée, malgré tout.
Avant de passer à la partie musicale de ce forum militant, le rendez-vous était fixé dès 18h, au Dock des Suds, pour prendre la température auprès des nombreux compagnons présents. Stands de sensibilisation, débats et discussions ont donc alimenté ce rassemblement solidaire. Pour ne pas oublier, aussi, qu’ensemble on est plus forts !
A 20h, la suite de cette soirée prenait un virage musical avec un premier concert et un artiste (que l’on sait) engagé. HK, le chanteur du groupe HK & les Saltimbanks, prenait donc le relais dans la grande salle pour une heure de concert. Accompagné de quelques uns de ses saltimbanks, HK a pu présenter plusieurs de ses nouveaux morceaux issus de « L’empire de papier », son premier album solo, qui sort le 3 mars prochain. Avec un show toujours aussi engagé, l’artiste a dépeint une société qui se cherche et qui se fracture, là où certains meurent dans nos villes et d’autres en Méditerranée. De manière grave et festive, HK a soulevé la foule et conquis les cœurs en n’oubliant pas de placer plusieurs de ses morceaux incontournables comme avec On lâche rien, Sans haine, sans armes et sans violence. Le bonhomme, toujours aussi attachant, aura laissé une place bien chaude aux Motivés.
Les Motivés, eux, n’ont pas pris une ride. Même 20 ans après leur fameux « Chants de lutte », qu’ils rééditent le 3 février prochain en « Motivés ! Y’a toujours pas d’arrangement ! » avec 4 nouveaux titres inédits, le groupe garde toute la spontanéité qu’on lui connait. Embarqués par les deux frangins de Zebda, Mouss & Hakim, ces derniers sont toujours aussi intenables et leur capacité à donner le pulse, sur scène, est intacte. Pour la première date de cette nouvelle tournée, Motivés n’étaient pas vraiment tout seul puisque Gari Greu, Tatou, Papet J et Blu du Massilia Sound System étaient les invités plus plus du concert.
Moqueurs, ce sont d’ailleurs les marseillais qui ont lancé les hostilités : Blu et Tatou se sont chargés de mener L’estaca, sur fond de valse, traduit du catalan en provençal pour l’occasion. Rejoints rapidement par toute la troupe des Motivés, ces derniers ont pu constater que le public était déjà chaud. En quelques minutes à peine, la machine révolutionnaire fut lancée à toute allure avec des morceaux mythiques que tout le monde repris à l’unisson (Hasta siempre, Bandiera rossa, El paso del ebro ou encore Bella ciao). Musique révolutionnaire pour musique libertaire, les musiciens assurent (mention spéciale à Rémy) tandis que les deux frangins ont de l’énergie toujours aussi communicative.
En marge de ces grands classiques que nous connaissions déjà, Motivés se paient de nouvelles escapades revendicatrices du côté du Mozambique à coups de A luta continua (de Miriam Makeba), sous la chaleur du reggae, avant de se taper un sacré délire rock sur Police on my back des Clash (« cours ! »). Si le groupe s’accorde un petit temps de récupération sur L’âge d’or de Léo Ferré, les invités se taillent aussi une jolie part du gâteau. Gari, fait son apparition sur scène, tandis que le Papet se prête au jeu des impros aux côtés de Mouss & Hakim pour lancer un morceau incontournable de Massilia, Ma ville est malade. Ces deux grandes familles réunies sur la scène des Docks font plaisir à voir et ça s’entend, les causes à défendre sont partagées. Dans cette ambiance détendue, La cucaracha peut retentir (« marihuana que fumar ! ») et provoque l’hystérie. Entre deux envolées de Mouss & Hakim qui partagent du Zebda (Oualalaradime et Y’a pas d’arrangement), les sourires sont sur toutes les lèvres.
Le dernier souffle de cette grande première viendra bien entendu de Motivés, le chant des partisans, qui résonna durant de longues minutes dans les Docks. « C’est bien plus qu’un « lalala » ! » dira Mouss. Cela va de soi ! Le constat sera identique sur Awah awah, d’Idir, missionné « pour faire résonner la fibre berbère qui est en nous ».
En 2017, y’a toujours pas d’arrangement. Le message est clair. Et il a été passé en toute subtilité sans citer personne. Les mots dépassent le simple stade du politique. Ici, il s’agit d’un état d’esprit, d’une manière de fonctionner qui replace la condition humaine au cœur du débat. « On est motivés pour une société meilleure, plus partageuse, plus solidaire ! On est motivés contre toutes les formes du fascisme et de l’intégrisme ! On est tous chez nous ! ».
Crédits photos : Jean-Baptiste Fontana (ici).