Festival la Magnifique Society (Reims, 51) 24 et 25.06.22

13 min de lecture

Une fois n’est pas coutume, nous voici de retour en Champagne pour vivre les deux premières soirées de la nouvelle édition de l’incontournable festival champenois de la Magnifique Society. Comme d’habitude, nous passerons le plus clair de notre temps devant la petite scène « Club trotter » où nos oreilles se sont bien régalées.

Vendredi 24 juin

Après nous être remis du Covid chopé quelques week-ends plutôt en festival, nous partons à l’assaut de la Marne avec la ferme intention de boire du champagne et de profiter d’une programmation joyeusement éclectique. Mais pas de bol, notre TER Grand-Est est supprimé nous obligeant à quelques contorsions de cerveau afin de rejoindre notre destination du jour.

Le presque beau temps aidant, nous arrivons heureux dans le grand parc de Champagne, happés par les notes emblématiques de Herbie Hancock et de son album « Head hunters » (1973). Te rends-tu compte cher lecteur, que cet album a révolutionné la soul et le funk tout en imprimant les bases du hip-hop avec l’utilisation du scratch ? Ce grand monsieur de 82 ans avait un immense sourire aux lèvres, preuve s’il n’en fallait que la musique, ça conserve !

Cette entrée en matière nous met de très bonne humeur pour aller découvrir l’australienne Courtney Barnett, incontournable reine indie-rock. La trentenaire au visage juvénile envoie du lourd pendant une heure, entourée de ses trois musiciens. C’est parfois bien nirvanesque, parfois plus nonchalant en mode rien à foutre mais c’est globalement très bon. C’est clairement le genre de concert qui te met sur de bons rails pour la soirée.

Nous passons ensuite écouter quelques titres de Clara Luciani dont le nom en lettres géantes orne la grande scène avant de nous rabattre sur l’excellent concert de BadBadNotGood loupé quelques semaines auparavant à Paloma. Les canadiens, originaires de Toronto, avaient visiblement oublié leur ingénieur lumière, jouant dans une grande pénombre agrémentée de projections de silhouettes d’arbres et autres ambiances de nature. Nous sommes un peu taquins tant leur jazz cinématique offre un beau moment de respiration devant une scène, certes assez sombre, mais entourée de grands arbres éclairés de lumières vives.

Ce moment suspendu nous permet de nous restaurer, de recharger les godets avant de s’installer devant la grande scène pour le moment que nous attendions particulièrement avec The Smile. C’est le grand retour de Thom Yorke, associé à Jonny Greenwood et Tom Skinner. Certains le détestent, tandis que d’autres l’adulent. Force est de constater que le personnage ne laisse pas indifférent. The Smile fait penser à une synthèse entre les expérimentations électroniques et solitaires de Thom Yorke (The Eraser, Tommorow’s Modern Boxes) et le rock trippant de Radiohead. Les 15 premières minutes de concert sont un peu difficiles avec des basses trop saturées qui couvrent tout le reste. Mais cela s’arrange au fur et à mesure avec des musiciens placés sur la même ligne, passant d’un instrument à l’autre avec une dextérité étonnante (Jonny Greenwood nous gratifiant de beaux passages de guitare joués avec un archer comme un certain Jón Þór Birgisson du groupe islandais Sigur Rós). Tous les morceaux de leur premier album « A Light For Attracting Attention » sont joués pour notre grand plaisir parsemés de nombreuses facéties de Thom Yorke qui danse ou fait mine de défiler pour un couturier. Difficile de ne pas se sentir transportés par cet univers riche et saturé dont les mélodies nous resteront en tête tout au long de la soirée. Car c’est sur ce concert que nous nous arrêterons afin de garder de l’énergie pour la journée (humide) à venir.

Samedi 25 juin

Il fallait s’y attendre, la pluie (voire plus) est au programme pour cette deuxième journée. Pourtant, on y avait cru avec un mois de juin particulièrement ensoleillé et chaud et un repas pris au soleil quelques heures plus tôt. Heureusement pour nous (et surtout pour les organisateurs), l’orage annoncé s’est rapidement éloigné du site du festival dans la soirée. Nous avions tout de même prévu le coup, débarquant dans le parc de Champagne… en bottes ! Festival de styles au programme et de musique aussi quand même.

Nous arrivons sur la fin du concert de Remi Wolf dont nous n’entendrons que quelques notes. Dommage, le set de la chanteuse californienne avait l’air prometteur. C’est donc avec Sen Senra, chanteur de hip-hop espagnol, que nous attaquons notre nouvelle journée champenoise. Première impression plutôt positive car ce dernier est entouré de musiciens. Oui lecteur, tu as bien lu. A l’ère des bandes sons, vocoder et autres playback devenus la base des performances scéniques de rap, cela ne fait pas de mal d’entendre un mec poser ses mots sur de la musique jouée en live. Autant vous dire que nous ne ferons aucun retour sur les concerts de Josman ou PNL, principales attractions du jour pour le (très jeune) public présent ce soir. Que retenir de Sen Senra ? Un bon set teinté de soul aidé par une langue espagnole qui amène chaleur et douceur à cette fin d’après-midi menaçante.

Nous restons dans les parages de notre petite scène préférée, bientôt sous une vraie pluie qui mouille pour suivre la performance de l’énigmatique Aime Simone. Ce musicien français, basé à Berlin, nous offre un univers clairement marqué par de l’indie-pop, du punk et de la techno. Curieux mélange qui accroche dès les premières notes tant le chanteur est captivant et incarne parfaitement notre époque faite de mixité et de questionnements. Affublé d’un Reckless (=téméraire) gravé sur la pommette gauche, c’est tout seul qu’Aime Simone défend son projet. Notre seul reproche est lié à l’absence de musiciens sur scène, ce qui donnerait plus de profondeur au set. Néanmoins, la découverte est là et nous garderons une oreille attentive sur les projets de ce musicien à découvrir.

Si la musique de Juliette Armanet n’est pas vraiment notre tasse de thé, force est de constater que la chanteuse est une bête de scène. Elle n’a pas hésité à s’avancer au contact du public sous la pluie à de nombreuses reprises, l’haranguant et se donnant entièrement à lui. Sacrée prouesse devant les jeunes amassés sur le devant de la scène pour ne pas rater PNL qui suit après elle sur la grande scène. Le show est mené à 100 à l’heure dans une énergie très communicative.

Nous retournons tranquillement vers la scène globe trotter pour assister au set qui nous a le plus fait kiffé du week-end avec l’australien Genesis Owusu. Flanqué de ses deux acolytes en mode spider-man ninjas, le chanteur d’origine ghanéenne a mis le feu au parc de Champagne en mode R&B teinté de rock’n’roll. Le show est à la fois d’une coolitude extrême et d’une énergie indomptable qui se propage à maintes reprises dans une fosse déchainée. Auteur d’un premier album étonnant, « Smiling With No Teeth » (que l’on vous recommande), sorti en 2021, Genesis Owusu trace sa route dans un style unique et assez inclassable. Est-ce le fait d’assurer le dernier show de leur tournée européenne qui les a amenés à tout lâcher ce soir ? Peut-être, en tout cas, nous, on s’est régalés !

Nous profitons ensuite du show de PNL sur la grande scène pour rejoindre le dancefloor de la Magnifique Society piloté de mains de maître par l’incontournable Yuksek. Et qu’est ce que c’est bon. Installé en mode Dance’O’Drome, son emblématique émission sur Nova, il enchaine les pépites tropicales et brésiliennes comme il sait si bien le faire. Et la joie circule instantanément sous les sunlights champenois dans ce club à ciel ouvert particulièrement bien conçu (même si cela a parfois un peu perturbé les concerts de la grande scène toute proche).

Retour ensuite sur notre petite scène préférée pour le show dantesque du House Gospel Choir venu tout droit d’Angleterre. Constitué d’un DJ et d’une chorale gospel, le concept est détonnant enchainant des titres de Kiss (I waaaaas made for looooooving youuuu) ou de house, toujours à près de 120 bpm. Bref, c’est puissant, joyeux, froutraque et dansant. Ce sera pour nous une bonne manière de clôturer ces deux belles journées à la Magnifique Society. Et pardon à MYD que nous ne verrons pas…

En conclusion, la Magnifique Society est un festival que l’on prend toujours plaisir à retrouver (malgré la pluie) car on a toujours la surprise d’y dénicher des pépites entendues nulle part ailleurs. Certes les têtes d’affiche sont là mais cela n’impacte jamais la programmation plus pointue de la petite scène. Donc merci de nous y avoir accueillis une nouvelle fois malgré notre lointaine origine sudiste !

Crédits photos : Olivier Scher

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