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Pour les 150 ans de la Commune de Paris, l’artisan du dub Dubamix a sauté sur l’occasion pour revêtir son bleu de chine et repartir aux fourneaux. Un an tout juste après le retentissant « Camarades », on sent bien que les cendres sont encore brûlantes pour Grégory Benzekry. Question de conviction politique, question d’affinités musicales…
Si, forcément, on attend une tournée digne de ce nom pour skanker au rythme du richissime « Camarades », le dubmaker Dubamix compte bien battre le fer tant qu’il est chaud : impossible de passer à côté du ‘discret’ anniversaire de la Commune de Paris de 1871. Comme un symbole, c’est le jour de sa 150ème bougie soufflée (ou barricade soulevée) que ce tout nouvel EP a été dévoilé. Et même mieux, il a été offert aux nombreux aficionados qui le suivent, comme souvent chez cet artiste.
« Communardes, communards », c’est 4 titres pour faire revivre l’âme de la Commune à travers des combats qui agitent toujours les consciences de ceux qui refusent le système en l’état. Comme un étendard qui n’a jamais été mis en berne, ce mini-album a été réalisé dans le sillage du dernier opus, en plus compact. Musicalement, on sent clairement que celui-ci s’inscrit dans l’univers du précédent : d’une part, on retrouve la marque de fabrique de ce dub rouge et noir que distille Dubamix, jamais cloisonné, où le dub côtoie le reggae, le rap ou encore les musiques du monde. Une ouverture sur le monde pour mieux le dompter ! Ensuite, on baigne aux côtés d’une partie des invités déjà entendues sur « Camarades » pour garder le poing levé. Limpide.
En ouverture, le titre éponyme de l’album se charge de poser les bases de ce voyage temporel : on se croit d’abord aux côtés d’Harrison Stafford pour voguer sur un reggae cuivré mais c’est Marina P qui prend la barre… avant de basculer dans une frénésie totale ! Nada hausse le ton et Drowning Dog, avec son flow hip hop, se chargent de nous faire prendre conscience qu’il va falloir se bouger si on ne veut pas sombrer dans ce chaos ambiant. De Montmartre, premier point stratégique, à la fuite des têtes dirigeantes vers Versailles, ce début d’EP a comme vocation de nous rafraîchir la mémoire : des envies de liberté à la déclaration de la Commune dix jours plus tard, le drapeau rouge est levé.
La suite monte une première marche au niveau de l’intensité avec un Jeanne plus que percutant : les guitares rugissent et un clin d’œil Béru ne serait pas anodin… Guitares saignantes pour des skanks bien aiguisés, la lutte devient alors hybride ! Nada et Gé (Latwal) reprennent des revendications issus de textes de 1886-1887 et les armes ne sont pas lâchées… « Si noire soit notre misère, fêtons le grand anniversaire ! ». Dans un écrin digital, la machine s’emballe vers une reprise qui devait à tout prix figurer sur ce « Communardes communards », La semaine sanglante.
On ne compte pas le nombre de reprise de cette chanson de Jean-Baptiste Clément sortie en 1871, mais Dubamix ne pouvait pas passer à côté : c’est en compagnie de Julien (Joke) que le flambeau s’est transmis. Nappée d’un synthé revitalisant, la compo s’offre un coup de polish à la sauce dub, quasi-hypnotique, mais « ça branle dans le manche / les mauvais jours finiront / et gare à la revanche / quand tous les pauvres s’y mettrons ».
Ce tour de piste pas encore achevé, c’est justement auprès de Versaillais Versaillais que le périple s’achève, aux détours des « cocardes écarlates », pour repartir à sa genèse : car c’est en comprenant l’origine du mal, là où le poids des mesures restrictives et liberticides ont pris de plus en plus de place, que la rue a fini par craquer. Et Dubamix a trouvé son porte-voix, Daman puis Fred Alpi, se chargent de dénoncer la mort de la Commune par Thiers et les Versaillais. En revanche, ils n’oublieront pas une chose : à Paris, il reste l’esprit des insurgés ! Violon sous le bras, le dub de Dubamix prend alors une toute autre dimension… il vole vers un passé pas si lointain qui rappelle une chose : rien n’est jamais figé.
Dubamix, « Communardes communards », disponible gratuitement (ici) depuis le 18 mars 2021 (4 titres, 19 min).