Barjac m’en chante, jour 6 : Un final en apothéose sous les étoiles (Barjac, 30) 02.08

15 min de lecture

Pour une sacrée dernière journée, c’était une sacrée dernière journée. Le soleil était au rendez vous comme toute la semaine, sous le chapiteau, mais encore plus que les jours précédents. Comme un clin d’œil à cette belle aventure qui prend fin. Les étoiles ont illuminé le ciel autant que Géraldine Torres et HK et ses saltimbanques, plus que jamais à leur place, à Barjac (30) ! Un feu d’artifice musical pour se dire au revoir !

« Bienvenu chez nous, on va faire la 9 de l’album, la 11, on l’a déjà faite » – Léopoldine HH

C’était une découverte que cette jeune chanteuse, qui commence à se faire un sérieux nom dans « le métier ». Son premier album est sorti en 2016, et depuis elle le présente sur scène, entourée de ses deux musiciens. Et quelle ne fut pas notre surprise de voir les deux musiciens en questions habillement cachés derrière synthétiseurs et machines en tout genre. Alors bien sûr, de temps en temps la machine se transforme en guitare, et quelques envolées nous font souffler. Mais le tout est orphelin d’un vrai cœur musical, qui ne soit pas artificiel.

On s’amuse pendant le spectacle, l’interaction avec le public est excellente, un bretzel géant circule dans la foule. On est charmés par la voix de Léopoldine HH, par la complicité et la complémentarité des deux voix quand elle est rejoint par une voix masculine, comme Pour oublier ou Illuminé, qui s’écoutent agréablement en arrivant à faire abstraction des sonorités électroniques qui tournent en boucle derrière. De l’humour pour présenter les chansons, en ne les nommant qu’à travers le numéro auquel elles trônent sur l’album, des blagues à son public, une belle partie du travail est réussie. Mais pour le reste…

Leopoldine HH à Barjac m'en chante

En regardant de jeunes artistes comme Léopoldine HH, on espère se faire une idée de la chanson française de demain, de la « chanson littéraire » comme elle l’appelle, de la gueule qu’elle aura dans quelques années. Et ce n’est pas cette gueule que l’on souhaite voir, cette tronche qui fait la part belle aux machines, qui joue de l’électronique plus que du cœur. Alors c’est bien fait, il y a des choses très intéressantes, une belle énergie, des textes qui (parfois) méritent plus qu’une oreille distraite, mais définitivement c’est non, le futur de la chanson ne peut pas avoir cette tête-là. Ou alors qu’on l’oublie et qu’elle inonde les ondes…

« On est plus forts quand rien ne vaut rien » – Wallace

Wallace c’est un projet détonnant, étonnant, où Erwan Naour, ancien chanteur des Hurlements de Léo, venait présenter ses nouvelles chansons, sous un format guitare-violon-voix. Parfois une deuxième guitare, folk celle-ci, venait apporter un peu de fraîcheur.

On aura été charmé par quelques-uns de leurs titres, Le Chant des Baleines en tête, leur reprise de Brassens, La Mauvaise Herbe, avec trois voix, était un petit bijou. Malheureusement une partie du public était déjà partie, pas encore prête à entendre les solos de guitares électriques folk, dissonant mais très justes du guitariste. Le Paradis c’est nous nous fait du bien, sans doute légère, elle redonne le sourire et l’espoir.
Les transitions peuvent s’enchaîner sans laisser le public respirer, ça fait parfois du bien. Parfois, on se retrouve pris face à quelques longueurs (Venise Venise, Vivre vieux…), mais c’est aussi ce qui fait le charme de ce groupe. Musicalement on sent qu’ils se sont trouvés dans une configuration pas habituelle, et face à un public qui, d’entrée, n’a pas été réceptif. Dès lors la partie était perdue.

Wallace à Barjac m'en chante

Nous attendions ce concert de Wallace avec impatience, nous repartons avec des belles choses dans la caboche, une voix toujours déchirée et déchirante, des passages musicaux à vous renverser, mais aussi avec un sentiment de manque. Il y a sans doute encore à faire avec ce projet pour qu’il prenne encore plus son envol. On le leur souhaite !

« Les communistes, c’est plus ce que c’était » – Géraldine Torrès

La dernière soirée était un coup de poker de Jean-Claude Barens à la programmation, un quitte ou double, avec des artistes dont l’engagement et la qualité n’est plus à prouver, mais à approuver à Barjac, par ce public si particulier qui peut vite prendre la mouche, aussi vite qu’il peut ériger au rang de demi-dieu (ni maître) un artiste qui va réussir à les toucher.

C’est donc Géraldine Torrès, l’écorchée vive, petite-fille de mineur et résistant à Franco qui va ouvrir le concert. Déjà bien entourée, par une contrebasse, un violon et une guitare, nous attendons l’artiste de pied ferme.

Géraldine Torrès à Barjac m'en chante

Et quelle ne sera pas notre surprise tout au long du concert… si nous connaissions son premier (et dernier aujourd’hui) disque, nous ne l’avions jamais vue en concert. C’est un coup de cœur de ce festival. Les textes sont bien écris et ciselés, la voix, sans inventer un monde est très agréable à écouter, la musique est d’une densité incroyable, et met en avant les mots de Géraldine Torrès (Le séquoia, Quand on y pense…).

Ce concert c’est également de la poésie, avec un texte d’Allain Leprest, magnifique comme toujours, La Moneda, sur les dernières heures d’Allende. Quelle douceur de re-découvrir encore des textes d’Allain remis éternellement au gout du jour, immuables, immortels. Une chanson, écrite par la chanteuse celle-là, rendra hommage au glorieux ancien qui aura été sur toutes les lèvres pendant ce festival.

Enfin, cet avant-dernier tour de chant était placé sous le signe de l’engagement, des cris du cœur. Mais de ceux-là qui sont intelligents et nous forcent à jeter une oreille, avant de balancer la deuxième avec plaisir. Géraldine Torrès reprenant Ma France, mais remis au gout du jour à sa sauce, en expliquant devant un parterre de fidèle de Ferrat qu’elle « n’a pas eu le droit de changer un mot », est un savoureux moment. La public de Barjac répond bien, ce qui n’était pas chose gagnée tant l’œuvre du créateur du festival est un monument. Mais quelle délice d’entendre la chanteuse parler des ayant-droits et dire que, vraiment, « Les cocos c’est plus ce que c’était », ici, à Barjac, un délice qu’on vous dit !

Géraldine Torrès à Barjac m'en chante

Les chansons en espagnol, les chansons de luttes où se mêlent le cœur et l’espoir viennent ponctuer un set qui nous aura scotché par ce bout de femme qui a des choses à dire, et qui les dit bien. Oui, c’est une évidence, Géraldine Torrès est un de nos coups de cœur du festival !

« Ce soir nous irons au bal » – HK, l’empire du papier

Après une pause, le public se rassoit. Enfin se rassoit… Une fois n’est pas coutume, une belle partie du public est restée debout, sur le côté de la cours, pour pouvoir danser, hors de question de rester assis sur les révoltes et les mélodies endiablées de Kaddour Hadadi et sa joyeuse bande !

Un solo de trompette pour renter dans le concert, audacieux jusqu’au bout. Puis HK arrive, déjà sous des airs d’accordéon pour mettre le public dans le bain d’un concert et des révoltes Sans Armes, sans haine, sans violence.
Huit sur scène, c’est moins que Loïc Lantoine et ses punks, mais c’est tout de même assez rare pour être souligné. Pour cette nouvelle tournée, HK s’est entouré d’une ligne rythmique solide et d’un guitariste distillant riffs et solos tout au long du concert, apportant un souffle nouveau et revigorant à toutes les anciennes chansons du répertoires du Citoyen du monde. Et le public s’est pris au jeu, lui pourtant frileux devant les envolées de guitare a applaudi, chanté, crié, en un mot : s’est régalé !

Deux choristes sont venus donner du coffre, une touche de féminité également, et une très belle alchimie à ce grand tout, tout au long du concert. Salam Aleykoum a été repris par tout le public, qui s’est levé, un peu forcé par le chanteur, un peu forcé par ses jambes qui le démangeaient, et qui a dansé. Rien de mieux qu’une valse pour aller au bal avant l’heure. Cet espoir fou que tout artiste venant à Barjac souhaite voir se réaliser est devenu réalité hier. Qui l’eut cru ?

Jean Ferrat est revenu également, comme pour signifier une transition, comme pour montrer que la nouvelle génération n’oublie pas les glorieux aînés, ceux-là à qui ont doit beaucoup, et ce fût un délice d’entendre En groupe en ligue en procession, rock et douce, chantée conjointement par HK et Géraldine Torrès.
Un moment incroyable qui n’en finissait pas, avec les célèbres Niquons la planète, On lâche rien et l’Empire du papier qui ont fait lever le poing, comme pour ne pas oublier qu’HK est un humain avant tout, avec des causes nobles et grandes, qu’il n’oublie jamais de mettre bien en avant dans ses concerts.

C’était un public varié, du moins, plus varié qu’à l’accoutumé qui était présent dans la cour du château, s’ajoutant, se greffant à se noyau dur qui ne demande qu’à s’ouvrir. Et ce courant d’air frais à sonné une douce comptine aux oreilles du vent. Le pari est mille fois réussi, Barjac a dansé, Barjac s’est levé, Barjac a applaudi, Barjac s’est révolté et s’est mis à espérer ensemble. Décidément, oui, c’est une évidence, HK et ses saltimbanques étaient bien à leur place, ici, à Barjac, dans cet antre de la chanson. Comment finir en beauté ce festival ? Il semblerait qu’il y ait ici une recette !

Un compte rendu global de cette 26ème édition sortira sous peu, mais nous en avons pris plein les yeux, plein les oreilles, plein le cœur sous le soleil gardois toute cette semaine. L’occasion de saluer une nouvelle fois la belle équipe, technique et bénévole, qui a fait de cette fête un moment de partage, d’échanges et de découvertes. Rendez-vous dans un an, comme dirait l’autre !

Bapt

La musique ou la mort?
On peut chercher des réponses à nos questions à travers différents miroirs de notre société, la musique demeure l'un d'eux.
La musique est un indicateur de la santé des temps qui courent.
Sa force à faire passer toutes les émotions et tous les rêves est indiscutable, et indispensable aujourd'hui !

3 Comments

  1. Salut

    Ces échos de festivals sont intéressants, toutefois, un peu d’attention ne serait pas superflue pour éviter des fautes d’orthographe ou d’accords de participe qui brouillent parfois la compréhension..
    Cordialement

    • Bonjour,
      Ah ces traditionnelles fautes d’orthographe… C’est sûr, on ne sera jamais parfait ! En revanche, couvrir 6 jours de festival et rédiger 6 papiers en mode long format en bossant à côté, c’est à croire que l’exigence des lecteurs est aussi élevée que celle du public de Barjac. Je pense que le chroniqueur sera ravi de lire votre contribution sur le contenu des articles, à savoir sur la musique, les textes et la poésie.
      Très cordialement

      • Je ne fais pas une fixation sur les fautes quand elles ne nuisent pas à la compréhension, ce qui est le cas à plusieurs reprises dans cet article, et c’est dommage pour le contenu. Pour ce qui est de couvrir des festivals de 6 jours, et même en publiant tous les jours un petit format papier de 4 pages, je sais ce que ça suppose de temps et d’investissement personnel quand c’est bénévole. Nous avons fait ça pendant plus de 7 ans, et ça continue aujourd’hui sous une autre forme. Mais avec la même exigence en matière d’écriture, parce que ce qui me semble l’essentiel c’est d’être bien compris par ceux qui lisent.. Et au sujet de Géraldine Torrès, au lieu d’une vague allusion à un « incident » avec les ayants droits de Ferrat, j’aurais aimé savoir ce qui s’est passé vraiment au sujet de cette chanson. Parce que pour les « mises à sa sauce » dans les chansons du répertoire, il y a eu de beaux assassinats.. Puisque l’auteur semble prendre le parti de la chanteuse, il serait bien de savoir la position éventuelle de la défense si j’ose dire.

        PS la ligne sur Loïc Lantoine méritait quand même la correction pour une bonne compréhension..

        « si nous connaissions son premier (et dernier aujourd’hui) disque, nous ne l’avions jamais vu en concert. » à lire ça, on peut comprendre que c’est le disque et non Géraldine Torrès..

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