Après Moriarty et son ambiance feutrée, Le Musicodrome réinvestit Paloma en cette fin janvier pour assister à une autre performance. Oui, entendons-nous bien, nous parlons ici de « performance » tant les styles peuvent être littéralement opposés mais tout aussi maîtrisés. Si Didier Wampas est assurément toujours le roi, il fallait bien s’accrocher vendredi dernier pour tenir le choc jusqu’au début de la nuit. Les guitares étaient à l’honneur, le punk aussi, et la sueur, évidemment.
A voir la file d’attente devant l’immense esplanade de Paloma de longues minutes avant même l’ouverture des portes, le moins que l’on puisse dire est que les gardois (et un bon nombre de départements limitrophes présents ce soir) n’avaient pas pris cette affaire à la légère. Car il est vrai qu’il fallait venir tôt à Paloma pour ne pas rater la première partie de cette soirée, à savoir Bob’s Not Dead. Seul sur scène, uniquement muni de ses deux guitares qu’il permute ainsi que de sa boîte à rythmes capricieuse, le gus tient la dragée barre. Croisé déjà à deux reprises à Montpellier au cours de précédentes premières parties, Bob’s Not Dead trace sa route et convint toujours, comme auparavant. De la maturité, de la maîtrise et aussi de la spontanéité, le set n’a duré que 40 minutes mais a fait mouche. Embarqué avec son « Rock’n’roll vespa » (2014) qu’il continue de défendre, Bob enchaîne. Puisant ses influences dans Renaud, Brassens et d’autres briscards punk, sa musique est à la fois écorchée et drôle, où le verbe, affûté dégaine sur tout ce qui bouge avec une malice assumée. De la vérité troublante (Vie à crédit) et sincère (Chanteur de bars) à d’autres plus détournées (Mon émancipation, Jah Rastafaraï, Fuck off), Bob’s Not Dead joue des styles, des genres, des mots comme on en a salement perdu l’habitude d’en faire…
La place, chaude à point, ne mit guère de temps à s’embraser lors de l’arrivée des Wampas au grand complet. Une introduction digne des grands soirs avec Comme un punk en hiver, histoire de rappeler d’entrée les bonnes manières, Paloma est déjà acquise. Embarqués sous l’étendard de leur dernier album, Les Wampas « Font la gueule », le groupe s’est chargé d’allumer la mèche comme au bon vieux temps. En canardant à tout va, Les Wampas ne voulaient laisser aucune chance aux nimois de s’en sortir. Le public, connaisseur, n’en a pas perdu une miette : alternant nouveaux et anciens morceaux, tout a fonctionné sans accroc. En misant sur les nouveaux titres aux grosses guitares (Les ravers de Spezet, Les lesbiennes bavaroises, Je voudrais…) ou penchant vers son trash déjanté (Marfa, Le fest-noz d’Halloween…), Didier Wampas mène le vaisseau Paloma à bon port !
Intenable, Didier Wampas est sur tous les fronts : si l’on peut penser qu’il redouble d’effort sur les morceaux plus récents, ce dernier est encore plus allumé sur ses grands classiques. Des bombes intergénérationnelles (Yeah yeah, Oï, Puta, Rising, Ce soir c’est noël…) aux fameux attendus tels que Rimini ou Manu Chao, les détonations se font entendre. Des bonds répétés et incessants sur la scène ainsi qu’aux assauts lancés au public, Didier Wampas chante peut être toujours aussi faux qu’il en décuple son énergie ! Quand il ne chante pas, allongé et porté par le public, Julie London, il slame à gogo, change de guitare ou interprète les célèbres Bottes rouges depuis les balcons de Paloma… après avoir baigné dans la foule et escaladé sa façade !
Toujours plein d’humour, « attention, un micro va traverser la salle ! » quand il jette son précieux sésame depuis l’étage, le show ne se sera jamais arrêté… Inusable, inarrêtable, Didier Wampas défie la chronique. Le groupe en lui-même la défie, pour preuve : si Didier Wampas assure, le groupe tout entier dégage cette sensation que la machine est rodée, infatigable. Pratiquement le dernier punk français après plus de 30 ans de carrière, le rappel en gardera le symbole : à coups de C’est pas moi qui suis trop vieux, votre musique c’est vraiment de la merde, Didier Wampas n’en oublie pas ses habitudes, For the Rock ! Entre quelques piques bien placées sur CRS (devant la synagogue) et une Petite Fille jouée sur le dos d’une de ses fans ayant slamé avant, nul doute…
… Didier Wampas est le roi !