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C’est en furetant les concerts de l’automne prévus à Montpellier (34) qu’une drôle de nouvelle s’est présentée à nous : les très énervés The Death Set sont de passage dans la bouillante Secret Place le 14 octobre prochain (malheureusement, le concert a depuis été annulé). Mais après tant d’années de silence, que signifie cette venue impromptue du trio australo-américain ? Un nouvel album, forcément ! En effet, la veille du 11 septembre, The Deat Set a déboulé avec « How to tune a parrot ».
Un doux soir d’octobre 2011, à Marseille, The Death Set faisait vibrer les murs sombres du Cabaret Aléatoire à la Friche de la Belle de Mai. Un concert court mais d’une intensité inouïe qui portait un sceau jaune pétard du nom de « Michel Poiccard ». Ce nom, outre l’interprétation du monsieur par le regretté Belmondo, correspond aussi au second opus sorti par The Death Set en 2011 justement. Un album d’une puissance inébranlable porté par une intensité incroyable, où Beau Velasco, membre-fondateur du groupe parti 2 ans plutôt, apparaissait en filigranes. Si l’énergie est littéralement le fil conducteur des 17 titres qui le constituaient, The Death Set avait réussi un sacré coup de maître : il laissait de côté les influences plutôt punk/rock de « Worldwide », leur premier opus sorti en 2008, pour proposer un cocktail parfaitement bien dosé. De la glace pilée mais pas trop, de quoi se rafraîchir les idées et oublier la noirceur du quotidien, une belle dose d’alcool pour te booster, sans oublier un bon trait de citron vert pour le côté revitalisant. Bref, avec un shaker rempli de punk/electro et des passages mélo, The Death Set a su se relever et bomber le torse.
Avant de tomber dans l’oubli, The Death Set avait sorti un EP surprise de 4 titres en 2014, « King babies ». Dans la continuité de « Michel Poiccard », on a vite compris que le groupe avait trouvé sa voix : par exemple, avec Think shank, il nous proposait une grosse bombe punk/rock boostée aux machines qui nous faisait penser que le groupe comptait à présent jongler entre les sonorités de ces deux premiers albums. Un EP réussi mais qui semblait être tout simplement l’extension du second LP.
Quel visage compte donc aborder The Death Set en 2021 ? Il y a en tous cas quelque chose qui n’a pas changé : c’est le côté expéditif du groupe ! Dans la pure tradition punk, The Death Set aime toujours les morceaux courts. Avec 13 morceaux en… 28 minutes, difficile de faire plus rapide. Le mot d’ordre de l’album est clairement l’urgence, impossible d’y couper. Il s’écoute d’une traite, sans pause et sans intermède, et il peut aussi désarçonner. Surtout dans sa première moitié. A l’image d’Overload damage ou Fall down qui enchaine, The Death Set a choisi d’augmenter encore le niveau de l’intensité en proposant deux tracks, en ouverture, qui donnent d’emblée le ton : c’est un rouleau compresseur punk/rock qui prend les devants et qui écrase tout sur son passage. Sur Bad decisions et Elephant, même si le refrain s’entonne un peu plus, le groupe déroule une partition en un seul bout et n’accorde aucun répit. Dès que le morceau est goûté, il est immédiatement ingurgité. Pas de mâche possible, pas de nouvelles saveurs en bouche, et c’est dommage. C’est davantage le cas sur I’m sick with it, mais le refrain aurait tendance à prendre la tête !
Passé ce début en demi-teinte, la situation parvient progressivement à se décanter : il y a enfin des changements de rythme au milieu de cette agitation assez noisy, avec Oh my god, qui voit les arrangements electro prendre un peu plus de place. Et cette sensation de diversité et d’éclectisme s’installe peu à peu : sur Set for death, une facette plus mélo se laisse approcher, faisant penser à des envolées de l’opus précédent, et ça fonctionne. Ce ressenti se retrouve également sur Best kept mess qui, malgré un sceau résolument punk, part dans un délire foutraque dans sa deuxième partie. Les sens se réveillent enfin ! A croire qu’il fallait un déclic pour enfin aller de l’avant, Nowhere is here baigne dans un air de jouvence qui respire la bonne humeur ; puis, plus loin, un délire ado se met à envahir les ondes (Closed eyes).
La bride enfin lâchée, le dernier quart d’album déroule : Mad world arrive pleine bourre et une vague punk déferle, pogos assurés, avec des coups bien placés ! This enemy is my best friend, malgré sa sobriété, force à sourire, et les claviers se chargent d’enrober d’un soupçon pop une invitation surprenante au milieu de ce chaos ambiant. Et pourtant, histoire de nous montrer que The Death Set en a encore sous la pédale niveau créativité, il nous propose un Remind me who’s suffering déconcertant. C’est avec son morceau le plus calme (tout est relatif) mais aussi le plus long (2’56, tout est relatif) de l’album que The Death Set nous fait vaciller : avec une rythmique lancinante et cosy, le morceau, dans un écrin electro/rock, nous balance une grosse claque inattendue. Et ce serait presque dommage de ne pas en avoir reçu d’autres !
En conclusion, après une première moitié d’album très intense mais surtout assez simpliste, The Death Set s’est heureusement rattrapé sur la seconde partie de ce « How to tune a parrot » avec un peu plus de génie dans ses compos. Pour l’audace, il faudra encore se montrer patient… Après quasiment 10 ans d’absence, on ne peut être que ravi de retrouver The Death Set aux affaires… mais il ne renverra pas « Michel Poiccard » au placard. Hâte de retrouver la folie du groupe sur scène !
The Death Set, « How to tune a parrot », disponible depuis le 10 septembre 2021 chez This Charming Man Records (13 titres, 28 min).