De la poésie haut vol pour ce nouveau court-métrage de Baloji, The yellow version, dont la bande son est issue de son album « 137 avenue Kaniama » (Soptlight, Glossine et Ciel d’encre).
Le rappeur « Congaulois » comme il se définit, cumule les casquettes avec brio et élégance. Sa musique, elle aussi à la croisée des mondes et des chemins, bouscule les codes préétablis ; un genre de world-hip-hop exalté qui se balance entre des beats d’électros et de rumba traditionnelle, de jazz, d’afro-funk et de soul. Ses textes sont puissants et sont flow incarné.
Après l’envoûtant Peau de chagrin / Bleu de nuit et le satirique Kaniama Show, la dernière réalisation cinématographique de l’artiste ; Zombis – clin d’œil à Fela Kuti ? -, est un ovni éblouissant. Une odyssée futuriste et onirique dans laquelle il explore avec dérision notre rapport aux nouvelles technologies mobiles, comme extensions de nos propres corps.
Un salon de coiffure, une course aux likes, le défilé d’une fanfare, un rond-point une décharge urbaine… Dans une boite de nuit 4.0, l’égo est une boule à facette, des jet-setteurs esseulés dansent avec leur propres reflets… C’est une déambulation dans une Kinshasa sur son 31, entre réalité brute et fantasme, extravagance et traditions, espoirs et désillusions. Ici pas de bleu mais la couleur jaune en fil d’Ariane, qui évoque la lumière… Celle à double tranchant du soleil qui nous fait la part belle ou bien qui nous brûle les ailes, celle des projecteurs aveuglants, de ces écrans et miroirs qui nous fascinent…
« Servitude volontaire / tu dors les yeux ouverts »
Dans la foule des Icares modernes, les esprits rodent, les masques dansent,… Baloji qui signifie « sorcier » en swahili transforme la matière, et ce qui était simple objet du quotidien (bouchons de bouteille en plastique, perruques et extensions, moustiquaires, préservatifs,…) devient parure sacrée, digne des grands défilés. – Les sapeurs congolais n’ont qu’à bien se tenir.
Car en plus d’être réalisateur (et musicien!), Baloji est aussi directeur artistique et styliste. En orfèvre il révèle de somptueux tableaux à l’esthétique flamboyante. Entre flashs subliminaux et instants photographiques piqués sur le vif, des scènes subtiles, criblées de références fugaces, de détails et d’inspirations.
En attendant son prochain long-métrage à paraître d’ici la fin de l’année, on ne se lasse pas de le regarder encore et encore… jusqu’à mal aux yeux.
Du génie !