En cette veille de jour de férié, double séquence découverte avec deux groupes que nous suivons de près depuis quelques années entre nos murs : SegFault et The Black Mantis Project. Tous les deux, ils viennent de sortir leur nouvel EP 4 titres. Avis aux amateurs de post-rock, de musiques électroniques et de bass music aux accents métissées. Oui, tant que ça !
SegFault « Hello world » (10 mai 2019) chez Capulet Production -POST ROCK/ELECTRO-
Rappelez-vous, été 2016. Vous ne voyez pas ? Peu importe : il y a tout juste 2 ans, Le Musicodrome tombait sur un jeune groupe de trip hop lyonnais prometteur, SegFault. Après une mini-tournée engagée pour présenter leur nouvel EP de l’époque, l’excellent « Bitten pick »; les voici de retour avec « Hello world » qui ne rime pas avec Bonjour tristesse !. Cette fois, plus de retenue et surtout pas de chichi : SegFault abat une autre carte, plus personnelle et moins passe-partout, en misant sur la rencontre des genres. Terminé le trip hop planant qui, malgré tout, fonctionnait sur la création précédente. Dorénavant, la place est faite au futur, à une ellipse temporelle où tout ce que nous avions imaginé n’est que poussières. Dans ce projet, SegFault plonge dans la matrice et passe en mode sans échec. Dans un univers où la guitare est toujours roi, l’atmosphère s’épaissit : à la limite de la suffocation, les lignes de code se digitalisent et une première bombe explose les ondes d’emblée (Warszawa 2242). Aucun doute, les lyonnais veulent proposer autre chose : que ce soit sur Detroit 2242 (doux saut vers l’inconnu) ou le ravageur Lhassa 2242, l’ambiance déroute. Sur ce dernier, un piano vient éclairer la nuit, là où la lumière ne semblait plus pouvoir percer, comme si un funambule jouait avec nos sens. Dans cet amas métallique, où le chaos court après la vie, Thèbes 2242 clôture l’EP en laissant cette nouvelle griffe post-rock s’exprimer. En l’espace de deux ans, SegFault a mûri son son et son univers et on a forcément envie d’en savoir plus… Alors, à quand la suite ?
The Black Mantis Project « Agora » (8 avril 2019) chez ODG Prod -BASS MUSIC/WORLD-
En 2017, nous étions tombés un peu par hasard sur les lillois de The Black Mantis Project, notamment sur leur très bon LP « Tetraktys » dont la chronique était sortie entre nos murs. Ces amateurs de bass music penchés world reviennent donc en ce printemps 2019 avec un nouvel EP, « Agora », qui réserve son lot de surprises. Comme SegFault, c’est donc un 4 titres qui vient titiller nos oreilles. Ces 4 titres représentent 4 rencontres, fructueuses, puisque tous ces morceaux ont été réalisées en collaboration avec d’autres artistes. On y retrouve bien les influences qui animent le groupe… et plus ! A l’image du track d’ouverture, Bohemians (avec Asa-i-Viata), le trad’ des Balkans se met à jumper sans ménagement avec la drum’n’bass de The Black Mantis Project. Le mélange est décapant et terriblement entêtant, la machine se lance sans s’enrailler ! Le métissage comme fleuron musical, la culture des uns allume celles des autres dans une orgie sonore : Ambivale, porté par V.Suresh, domine les cieux orientaux avec des notes dubstep bien placées avant qu’Henro (avec Scratchattic) s’offre un duel de scratches efficaces. L’assaut final, car il y en a toujours un, vient sur No tiene et Antimo Parreno, sur soupçons latins… digitalisés ! Puissant. « Agora ». Pas un hasard non plus. Il est l’identité du groupe, sans frontière, sans limite, au carrefour des influences et des rencontres autant humaines que musicales.