Le Musicodrome était présent, et en nombre, pour la 11ème édition du Foreztival à Trelins, charmante bourgade de la plaine du Forez. Une édition très attendue après une édition 2014 qui, on s’en souvient, avait tout simplement cartonné ! C’est donc sur une configuration à double scène, et une affiche étoffée, que l’organisation a misé pour confirmer que cet événement est une place forte et accessible en Rhône-Alpes. Birdy Nam Nam, Patrice, Fauve, High Tone ou encore les Soviet Suprem pour attirer un maximum de festivaliers ! On peut dire que cela a marché, puisqu’ils n’étaient pas moins de 19 500, presque autant que pour la décennie du festival.
C’est donc en arrivant sur les lieux vendredi, que l’atmosphère commençait à s’emplir d’une odeur d’excitation, les campings-champs commencent à gonfler dès le milieu d’après midi. De vastes étendues de champs, équipées de conteneurs et de toilettes sèches,étaient mis à la disposition des festivaliers. La tente est à peine plantée que des bénévoles passent entre les emplacements pour distribuer des sacs poubelles, noirs et jaunes, ainsi que le sympathique petit « guide du foreztivalier ». Un dépliant nouveau, plein d’humour, d’informations utiles et de bons conseils ! L’ambiance monte sur les campements, et les hurlements désarticulés fusant de toutes parts, invitant à prendre l’apéritif, résonnent entre les différents parkings mis à disposition. On appréhende quand même un peu la météo, la pluie n’était pas loin !
Une fois les commodités effectuées, nous avons donc pu assister à la fin de la performance du groupe Odlatsa. Bien qu’il n’y avait pas foule, ils ont effectué leur concert en transmettant une musique festive et joyeuse, teintée de poésie. Une performance égale à eux-même pour un groupe qui nous avait déjà séduit à la Rue des Artistes en mai dernier.
Akua Naru attaque son concert immédiatement après la fin du premier. Le soleil rayonne et les gens arrivent au compte goutte. Son hip-hop aux influences jazz et soul-music n’aura pas soulevé les foules, mais sa musique enivrante aura conquis les quelques curieux, et assidus, venus écouter ce qu’elle proposait.
Akua Naru au Foreztival ! crédit photo : (c)Nico Lafay
Pas le temps de faire une petit pause boisson ou snack, que l’autre concert commence directement. Mondogift est dans la place sur la scène plaine. Le groupe franco-sénégalais nous gratifie d’un concert de qualité, d’un gros son, de flow ravageur et d’une énergie positive rayonnante. Grosse mention aux dreads hilarantes du chanteur central. Les 3 MC se complétant parfaitement tant au niveau des voix que du style, ont bénéficié d’un public qui commence à ce moment à prendre du poids pour la venue de la très attendue SOOM-T.
Le crépuscule accompagne la venue sur scène de la réputée SOOM-T. Elle et son Dj montent sur la grande scène. Ils auront ravi la foule avec du gros son, et de grosses basses dub, ainsi qu’un débit bien maîtrisé par la chanteuse. Mais à nos yeux ils auront eu du mal à combler l’immensité de la scène par une présence si restreinte, et une musique quelque peu stéréotypée… on en venait à regretter une bonne vieille dub instrumentale. Cela dit, l’ambiance est réellement montée à ce moment, et cela a marché. Tout ça ne nous empêche pas de prendre une bonne Tartifourm’ pendant que SOOM-T déballe ses musiques, et ensuite d’attendre la venue du très tyrannique groupe bolchevik, Soviet Suprem.
La vague rouge dans la plaine du Forez – crédit photo : (c)Nico Lafay
Les deux compères, Sylverster Staline et John Lénine, apportent une énergie toute autre ! Surfant sur leur réussite et leur ironique vague rouge, ils enflamment la fosse de la scène « plaine ». Accompagné du Dj Croute Chef, ils déroulent leur set-liste avec une aisance déconcertante à coup de jeux de mots et de mise en scène simple et efficace. Le Rideau de Fer est tiré, la Propaganda est faite, la Red Army est chauffée à blanc pour une superbe Soviet Suprem Party ! Au passage ils envoient bon nombre de personnes au goulag, et notamment la tête d’affiche de la soirée, Fauve.
On se demande encore comment il n’y a pas eu de victimes lors de ce moment des plus transpireux.Après 1h30 de bon pogo, jump, et slam qui nous auront épuisé, la scène « mont » accueille le renommé collectif Fauve.
Après de bons souvenirs laissés, le collectif sur cette soirée n’a pas déployé l’énergie débordante et habituelle dont ils gratifient les publics. Un passage mitigé, avec un son qui semble alors mal réglé pour bien comprendre toutes les envolées littéraires du groupe. On n’a pas adhéré et pas pris notre pied lors de ce concert. Il faut quand même reconnaître la qualité du jeu de lumière, et le nombre important de personnes venues pour eux. Cela dit, pour avoir recueilli de nombreux témoignages, ils n’ont pas laissé une impression aussi bonne que lors d’autres concerts.
L’occasion donc d’aller se désaltérer avec une bonne bière et de manger une barquette de frites bien fournie au snack. C’est là où on remarque le sol recouvert de gobelets plastiques vides et pliés… une vision absolument épouvantable, peut être songer aux éco-cup ? Où sont-ils passés ?!
Bref, Alo Wala débarque, et là sur des airs de tropical bass, on a pris un coup derrière la tête. Un performance terne, redondante et répétitive. Bon, ça a fait bouger mais c’était tout de même laborieux. Du gros son électronique, un métissage d’influence hip-hop, dancehall, hindi… un projet musical dans l’air du temps qui a globalement plu, mais qui laisse tout de même une drôle d’impression.
Ce n’est pas grave, on s’est dit qu’on attendrait Birdy Nam Nam et High Tone avec Oddateee histoire de terminer sur une bonne note.
Birdy Nam Nam est donc arrivé, face à une foule conséquente le trio armé de ses platines et sa table de mixage distille un gros gros son électro ! La fosse est pleine à craquer et bouge, l’électro live fournie est de qualité. Petite déception tout de même, on s’attendait à entendre et nous faire surprendre par des petite touches funky ou jazzy dans leurs mixs. Cela n’a pas eu lieu, mais tout de même : simple, puissant et efficace. On notera la déclaration d’une festivalière déçue, « C’est la 3ème fois que je les voyais, je n’ai pas reconnu ce qu’ils faisaient. »
Une immense foule pour les Birdy Nam Nam – crédit photo : (c)Nico Lafay
Il est temps de clôturer la soirée avec High Tone. Le groupe lyonnais qui fait foi dans le monde de la dub est donc en place avec leur compagnon de route et de projet. Le fameux Oddatee. On est vraiment curieux de voir ce que High Tone allait faire avec ce Mc de Hip-Hop assez réputé dans son milieu. Un début de concert plutôt intéressant, avec des grosses beats, un chanteur enragé, et des sonorités recherchées qui accompagnent les flows hip-hop de Oddatee. Cependant au bout de plusieurs dizaines de minutes, il nous semble que le tour de la question est fait. Un peu déçu, on rentre donc dans nos chaumières installées dans les champs d’à coté. High Tone, à notre sens, est beaucoup plus fort quand il fait du High Tone. Trop d’accents rap dans ce projet. Cependant on ne peut que leur tirer un chapeau pour leur volonté de varier leurs sonorités et essayer d’autres choses.
Après une soirée au fort accent électro on ressent un petit manque d’instruments, de paroles engagées (Ouf les Soviets étaient là ! Mais chargés de sonorités électro également) et percutantes. Une tête d’affiche de la chanson française aurait été salvatrice, le Foreztival pourtant réussit bien souvent à en attirer dans ses filets. La deuxième soirée allait donc être globalement très attendue par une majorité de personnes interrogées. Qu’on se le dise aussi clairement la force principale du Foreztival c’est l’ambiance conviviale et festive qui réside dans l’enceinte et sur les campements.
Le samedi c’est rebelote. Après la soirée du vendredi, on profite de la journée sur le camping, au milieu de campements plus ou moins élaborés. L’ambiance est toujours chaleureuse, les bières coulent à flot et le son sort ici et là de certaines enceintes et voitures. Les dix bonnes minutes de marche pour rejoindre le site permettent de se rendre compte de la grandeur et du succès du festival : les six parkings sont tous bondés. On re-franchit alors la belle entrée et son lettrage massif : nous revoilà sur-le-champ au milieu des deux scènes. On échange quelques euros contre des bouix, la monnaie locale (1,25€ le bouix et 2 bouix = 1 bière) et on s’en va apprécier le flow et la qualité lyrique du rappeur lyonnais Kacem Wapalek. Entre les chansons de son premier album Je vous salis ma rue (on notera la belle contrepètrie !) et ses freestyles, Kacem chauffe le public.
Signe de l’éclectisme de la programmation, le jeune rappeur laisse la place sur l’autre scène à un des groupes marquants de rock indépendant des années 90 : les Sheriff. Les festivaliers se sont massés en nombre pour le grand retour du groupe. Les pogos se multiplient et le public reprend en chœur les chansons mythiques du groupe montpelliérain. Ne faisant pas spécialement partie de nos préférences musicales, on aura quand même apprécié l’énergie et la folie des Sheriff. Ils auront apporté pour le grand plaisir de nombreuses personnes, ce qu’il manquait peut être lors du premier soir.
La diversité musicale reste marquée de l’autre côté du champ. La scène Plaine accueille le chanteur de reggae dancehall Skarra Mucci, qui impose de suite sa voix et son flow. Sa musique est communicative et le public danse aux instrus dancehall de ses chansons, à l’image de Greater than Great. Les sourires sont figés et on ressent une atmosphère particulièrement joyeuse dans le public. Pour conclure magnifiquement son set, Skarra Mucci reprend longuement comme un hymne, My Sound, After Laughter Come Tears. Un coup de coeur, cette soirée du samedi est pour l’instant croustillante.
Du bon son plein les oreilles, les festivaliers ont à peine le temps de se « tartifourmer » que la tête d’affiche du soir est déjà en place. L’allemand Patrice débarque sur la grande scène devant une foule toujours plus grande. Bonnet rouge vissé sur la tête, marcel caché sous sa veste, Patrice donne le ton dès les premières notes : plein de classe et de charisme, il enflamme le public en reprenant tour à tour ses classiques, Change Today et autre Boxes. Les transitions sont assurées et le set maîtrisé grâce à des musiciens parfaitement rôdés. Patrice use tant et plus de son charme et transmet ses bonnes vibes à travers sa voix suave et son élégance naturelle. Il fait aussi jumper toute la foule avant de lancer sa tempête Soulstorm qui déferle sur tout le Foreztival. Musicalement impeccable, le chanteur montre aussi toute l’étendue de sa qualité vocale, en alternant entre le très aiguë et le très grave le temps d’une chanson. En guise d’au-revoir, il délivre a capella des messages de paix et d’amour. Mais avait-il vraiment besoin de cela pour ravir les cœurs des festivalier(e)s ?
De retour dans la fausse, nous attendons avec impatience l’arrivée de Fakear. L’artiste se fait un peu attendre dans la nuit (un peu) fraîche de Trelins. Mais dès les premiers beats, le jeune normand nous transporte dans son univers. Au gré des touches de son MPC et des musiciens l’accompagnant, Fakear nous emmène dans son long voyage nocture. Ses sonorités japonaises rappellent une forte diversité d’influence. Le DJ caennais fait l’amour comme personne à son MPC et ennivre le public avec lui. En reprenant deux fois La Lune Rousse, Fakear fait chanter la foule avec le célèbre (et involontaire) refrain « Mimy Mathy ». L’enivrement aurait pu être encore plus fort avec un mapping plus travaillé. Les installations en triangle derrière l’artiste semblaient aller dans ce sens mais la scénographie fut finalement assez simple. Bref, merci Fakear pour ce beau voyage !
Comme le vendredi, c’est sur la scène plaine que la soirée se termine, et avec 9 o’clock! On peut dire qu’ils ont foutu le feu, ceci en déployant une énergie folle. Ils ont ravagé le public grâce à leur indéniable qualité de scartch. Les trois DJs ont bien conclu. Avis aux amateurs de platines énervés, le groupe a pris date pour le futur.
En parlant d’enervés, on est aussi allé faire un tour au p3 le samedi soir après les concert. Deux sound systems pour contenter nombre de teufeurs avec des sonorités agressives et sur-excitées. C’est aussi une spécialité du Foreztival, le p3 pour les frappa-dingues ! Ensuite la nuit et le sommeil nous ont emportés pour une nuit réparatrcie avant de déambuler le samedi à Trelins où se passe de le dimanche du Foreztival, avec des arts de rue. Au top pour bien finir le week end.
Les tops :
L’organisation : on n’a quasiment jamais attendu et toujours été servi dans le sourire et la bonne humeur, tout au poil, un grand big up !
La tartifourme : excellente et rapidement servie
Patrice : on est tombé amoureux
Les autres groupes : Soviet Suprem égal à eux mêmes, les MC de Mondogift, la rage des Shériff, et les bonnes vibes de skarra mucci
Le lieu : La grandeur du site (camping) qui ne nous fait jamais sentir à l’étroit
le geste écolo : Le tri sélectif dans chaque parking
L’affiche : Le samedi soir de feu
L’ambiance : Sur les parkings, les campements, à l’intérieur du site, dans la fosse, la journée comme la nuit, les sound system, bref une ambiance conviviale et festive comme on l’aime. L’ambiance du Foreztival tout simplement.
Le dimanche : Un petit festival d’art de rue à Trelins pour redescendre sur terre et assister à des disciplines artistiques différentes que le musique, mais tout aussi intéressantes !
Les flops :
Les chiottes : Pas toujours très propres, que ce soit le coin toilettes des garçons (une rivière d’urine)
Le geste écolo : les gobelets plastiques envahissant le site des concerts
L’affiche : Le vendredi soir poussif hormis l’éclaircie soviétique. Clairement trop d’accents électroniques pour nos vieux os et nos attentes dans ce festival historiquement plus roots.
Les Bouixs : dommage que un bouix soit égal à un euros et vingt-cinq centimes. C’est dur de chiffrer sa consommation.
Les stands : Pas de village associatif, pas de stand en tout genre, juste un chapiteau de vente pour les groupes et un mini stand de prévention
La déco : Petit manque de couleur ou de déco à l’instar d’autres festivals régionaux colorés, comme les Démon d’or.
La chose qui décoit et réjouit à la fois :
La double scène : cela permet certes d’étoffer l’affiche et de passer plus de groupes, ce qui est fortement agréable. Mais on regrette presque les changements de plateau de l’ancienne unique scène qui nous permettait d’aller boire un coup sans rien louper, et surtout de ne pas faire des aller/retour incessants à travers un champs de cailloux. On peut presque penser que cela scinde aussi le public…
Article co-rédigé par Clemonstro et Jackonthemoon