Découverte cet été au Vercors Music Festival d’Autrans (38), Zaho de Sagazan venait se poser le temps d’une soirée dans le vaisseau Paloma de Nîmes (30). Changement de décor, changement d’ambiance, tout matche pour que cette nouvelle rencontre soit synonyme de bon moment !
Avant de laisser s’exprimer la symphonie des éclairs, ce mercredi soir nîmois débutait en compagnie de Petite Noir, trio porté par le sud africain Yannick Illunga. Régulièrement à l’affiche des soirées indé, c’était pour nous une toute première immersion dans l’univers de Petite Noir. Lui qui aime définir sa musique comme de la « noirwave », il a réussi à créer une certaine curiosité autour de son set. La salle n’affichait pas le plein (comme bien souvent en première partie) mais Petite Noir a réussi à garder le public présent tout au long de son set (toutes les premières parties ne peuvent pas en dire autant !). Le groupe a donc surfé sur différentes vagues (cold wave, pop, Rnb…) plus ou moins agitées qui ont rafraîchi. Une ouverture idéale avant de plonger tête la première aux côtés de Zaho de Sagazan.
Un tour au patio plus tard, la jeune artiste originaire de Saint-Nazaire prend les commandes de la Grande Salle. La soirée n’affiche pas comble mais pas la jauge est plus que bien remplie ! Sur scène, deux musiciens occupent les côtés pour contrôler machines et synthés tandis que Zaho de Sagazan prend place au centre avec, aussi, la présence d’un piano destiné aux envolées douces.
C’est donc dans un écrin à la fois soyeux et digital que le concert débute : La fontaine de sang, symbole cold-wave de l’unique album de l’artiste, ouvre le bal. On est presque surpris de voir que le second titre qui s’enchaîne correspond également au deuxième titre de l’opus, avec donc un démarrage à l’identique ! Aspiration fait forcément penser au chanté de Brel et on comprend, aussi, qu’avec « sa dernière cigarette », un côté hybride va envelopper le tout !
De là à penser que Zaho de Sagazan va tomber dans la facilité, c’est pourtant se tromper : on s’est bien demandé comment l’artiste allait tenir sur la durée du concert avec un seul et unique album au compteur, le délicieux « La symphonie des éclairs » sorti en mars dernier. Avec 13 titres pour environ 45 minutes, il y a forcément le double de temps à trouver… Passées les premières chansons, des éléments de réponse commencent à se dessiner : des nouveaux morceaux sont dévoilés (comme Le dernier des voyages), des anciens sortis de sa sonothèque (comme La déraison) et l’artiste contextualise surtout ses chansons.
Le fil est tendu, l’équilibre se trouve, Zaho de Sagazan trouve donc la bonne formule : avec Mon inconnu, le digital prend davantage de place et les deux musiciens derrière apportent un réel plus à l’univers de l’artiste. Sans cesse en train de triturer les machines, l’enveloppe posée sur l’auditoire se déchire et mute au gré des émotions de la protagoniste. Car il est bien là le point névralgique du concert : à l’image des textes de l’album, ce sont bien les émotions qui dictent le rythme de la soirée. Les dormantes, avec un amour délicieux et cruel, calme la frénésie ambiante avant un hypnotique Dis-moi que tu m’aimes, premier piano-voix de la soirée.
Quelques soubresauts plus tard, Zaho de Sagazan aime nous montrer les choses par deux : Je rêve, léger, laisse sa place à des lumières rouges dans un tourbillon saturé… Tristesse déboule (« marionnette on naît et on le reste »), la foule est électrisée ! Les sens explosent, « je contrôle tout le reste », la bride est lâchée, Paloma se réveille enfin.
Un souffle plus tard, c’est un autre titre phare de l’album qui pointe son nez, le fameux titre éponyme, La symphonie des éclairs. Paloma apprécie forcément, l’enchainement est bien trouvé, on regrettera pourtant que l’artiste ait privilégié la version « edit » de cette magnifique chanson qui se trouve certes moins vocodé mais beaucoup plus rapide que la version originale.
Pour la dernière demi-heure de concert, Zaho de Sagazan se libère des chaînes emprisonnant son Corps et appelle finalement à la raison avec Ne te regarde pas (« lâche toi ! »). Poussant les machines plein tube, le slow tempo de l’album disparait, la chemise est tombée, on sent bien que les chevaux électroniques arrivent au galop. Envies sexuelles affirmées et assumées, le curseur de la température continue de monter et c’est une effluve d’ondes et de beats qui se libère dans Paloma. Zaho de Sagazan appelle à la danse avec un seul et unique ordre, « dansez maintenant ! », pour accompagner le public jusqu’au rappel. Après quelques instants de répit, l’artiste revient avec Suffisamment, autre compo au piano, pour (re)poser ce beau monde.
Un peu moins d’1h30 plus tard, le concert s’achève et c’est une foule clairement conquise qui quitte Paloma. Nous repartirons toutefois avec une petite frustration, celle d’avoir eu droit à une quinzaine de minutes clubbing avant le rappel alors que deux titres de l’album n’ont pas été joués (Langage et Garçons). Il est certain que c’est un choix artistique mais il est pour le coup surprenant.
A côté de ça, il est vrai que toute la délicatesse et la subtilité de l’artiste apparaissent dans ce concert : les compos sont belles, bien écrites, la production est riche et les émotions occupent une partie centrale du spectacle. Zaho de Sagazan a su jouer sur l’intensité avec un côté popy, hybride et électronique qui fonctionne à merveille. Aucun doute sur le fait que l’artiste va continuer de monter !
Crédits photos : Photolive30