Temps de lecture : 2’50
Presque 10 ans après avoir pressé le bouton « stop », La Phaze a définitivement entériné son retour sur la scène alternative avec la sortie d’un nouvel EP éponyme, en attendant plus…
Déjà, en 2018, Damny nous confiait que le groupe allait repartir : après quelques dates en guise de tour de chauffe, force est de constater que leurs aficionados aiment toujours le goût des bonnes choses ! Tout juste 1 an après la sortie de « Psalms & revolution » en 2011, La Phaze signait son arrêt de mort avec le moral au fond des chaussettes. Blasé des nouvelles tendances musicales qui envahissent l’espace et en panne d’inspiration, le groupe avait préféré s’offrir un peu de répit. Arnaud Fournier est parti à la chasse des babas avec, entre autre, son projet Dead Hippies, et Damny a vogué en solo mais aussi du côté de la prod’.
Chez les communs des mortels, il est resté des disques à écouter et une bonne dose de patience. Depuis 2018, La Phaze avance à tâtons puisque deux clips ont été dévoilés et des dates à nouveau programmées. Deux ans plus tard, avec l’EP éponyme de La Phaze, trois titres viennent le constituer : on y retrouve justement les morceaux des deux clips et un nouveau qui ne passe pas inaperçu…
Sur cet EP, on retrouve indéniablement l’ADN du duo qui est désormais complétée par l’arrivée du machiniste Speaker Louis. Il y a de l’intensité et de la sueur, comme un fer brûlant qu’on approcherait un peu trop près, des machines suintantes qui ne demandent qu’à vibrer, mais aussi ce côté urbain qui était moins en avant sur leurs deux derniers LP, « Miracle » et « Psalms & revolution ».
Tabasse, qui lance l’EP, en est le symbole : les influences du monstrueux « Fin de cycle » (2005) se laissent à nouveau approcher. Tabasse. Assourdissant ! Les machines explosent, drum’n’bass vs dubstep, les guitares électriques renvoient les assauts répétés de Damny qui laisse exploser sa fureur. Remonté à bloc, « T’as appris à compter les coups, t’as appris à dompter la peur, les larmes devenues de l’urine, le sang mêlé à la déprime, pour supporter les coups de trique, tu te réfugies dans la musique ! ». Tabasse ! Ou un sérieux coup du droit qui fait saliver l’auditoire !
EP en écoute complète ci-dessus
La suite de l’écoute se poursuit avec Avoir 20 ans. Le français est de retour pour délaisser l’anglais. Le jungle, lui, est bien de retour, et il renvoie la pareille à des cuivres et un refrain en espagnol, petit clin d’œil au Barcelone de Damny depuis plusieurs années. Tendances hip hop en avant, La Phaze revient aux fondamentaux et se détache des notes rock qui avaient envahie « Miracle » (2008) et le plus hybride « Psalms & revolution » pour apparaître en second voire troisième plan. L’envie de mettre un beau coup de pied au cul des nouvelles générations tout en rappelant ses galères, Avoir 20 ans, reflète aussi l’évolution du duo fondateur qui a passé le cap de la quarantaine. L’énergie au service de la maturité, les consciences doivent rester plus que jamais éveillées.
L’EP se termine sur Sourire au teint de glace, le tout premier morceau dévoilé en 2018 depuis le retour officiel du groupe. Musicalement, c’est certainement le plus proche de ce que La Phaze a réalisé ces dernières années, un combo punk/rock qui se dédouble du fameux jungle « marque de fabrique » du groupe. Si ce morceau ne surprend pas vraiment les puristes et sonne presque comme déjà entendu, il a mérite de vomir une société qui court à sa perte. L’apologie individualiste, que ce soit derrière le culte du moi sur le dos des autres ou derrière un écran, n’est qu’un fragment d’une déchéance de l’homme qui ne sait plus où donner de la tête. Décadence des uns, déraison pour les autres, l’impact est imminent, c’est certain.
Avec ces trois titres sous les bras, La Phaze propose un avant goût de ce qui nous attend avant une sortie plus longue et plus intense. Le nouvel album, prévu pour octobre 2020, comptera 11 titres (dont ces 3 compos), et il sera accompagné d’une nouvelle tournée. Nul doute qu’il va permettre de se donner de l’air !
La Phaze, « La Phaze », disponible depuis le 7 mai 2020 (3 titres, 11 minutes) sur le label At(h)ome.