Kent semble inusable, inlassable. L’artiste continue l’oeuvre entamée il y a maintenant presque 40 ans avec Starshooters, avant de se lancer en solo dans un rôle de forgeur de mots, de couvreur de la chanson. Ce qu’il s’échine à faire. Avec brio. Ce dernier album : « La grande illusion », en est le parfait symbole !
Le disque est inséré dans le lecteur avec une envie non dissimulée, les oreilles sont aux aguets, prêtes à découvrir les nouvelles chansons de Kent. Le lyonnais ne se tait jamais bien longtemps depuis ses jeunes années, même si son dernier album « Le temps des âmes » datait, déjà, de 2013.
Éparpillé est la première chanson, et l’on prend une baffe. D’emblée. Une baffe à laquelle on ne s’attendait pas. Sur ce titre, on croit reconnaître Michel Corringe. L’intonation y est plus incisive, le cœur est toujours présent. De bon augure.
Le mot est toujours aussi juste, le verbe toujours aussi rond, le cuivre y donne du corps, tout est rassemblé pour faire de ce titre un grand morceau :
« Éparpillé / Des bouts de moi sont égarés / Dans des coins de vie détachés / Des pages de passé froissées / A des ombres mélangées… / Éparpillé / Mon corps et mon corps explosés / Dans des draps de lits étrangers / Des évasions envisagés / En quête d’identité »
Kent s’est sans doute assagis depuis ses premiers albums, mais il continue de saigner de la même veine que sur « Le Temps des âmes ». Un peu de burlesque avec les oranges bleues, beaucoup d’amour et de sentiments envahissent l’album à plusieurs reprises (Rester amis, Si c’était à refaire, La dérive des sentiments…).
On notera les arrangements comme toujours très travaillés, où la guitare garde une place importante et s’électrise à juste dose, pour ne pas croquer le piano, tout en permettant aux cuivres de donner parfois une autre gueule à ces chansons. Les cœurs qui s’offrent timidement sur plusieurs titres apportent un plus indéniable.
Kent est peut être un « Revenant », comme il se plait à se présenter. Cette balade est sans doute la mieux écrite de l’album et celle qui vous capte le plus facilement. Pour mieux vous ouvrir aux autres.
L’album est jalonné par des questionnement sur lui même, ou sur son personnage. Quel est ce lui qui se tourmente ? La réponse nous restera inconnu, et l’essentiel n’est pas là, si cette question continue d’engrosser de telles chansons, alors ne lui cherchons pas de réponse.
Un cœur en Automne résonne, triste et pourtant si beau, pour clôturer l’album. Ce titre semble le reflet de cet ensemble, tellement tendre, tellement personnel et dans lequel on se plait pourtant à se reconnaître, à re-naître un petit peu, au moins quelques minutes, sous ce nuage d’une musique colorée et envoûtante au possible.
» J’ai le cœur en automne / besoin de personne / simplement l’envie / l’envie qu’on m’oublie / le cœur en automne / envie de personne / en flagrant délit / de mélancolie »
Ce sont donc dix titres de très bon calibre qui nous sont proposés par Kent, on reste presque sur notre faim quand le disque se termine. Tout en tendresse et en mots, dissimulant tendrement une fougue toujours bien présente, Kent se conforte dans son rôle d’artisan de la chanson. D’une chanson fine et intelligente comme il est toujours bon d’en entendre. Un oasis au milieu du désert, c’est évident, pour nous, cet album est bien loin d’être « Une grande illusion ».
FICHE TECHNIQUE
Tracklist
1. Eparpillé
2. Un revenant
3. L’heure des adieux
4. La grande illusion
5. Chagrin d’honneur
6. Les oranges bleues
7. La dérive des sentiments
8. Rester amis
9. Si c’était à refaire
10. Un coeur en automne
Durée : 43 min
Sortie : 3 février 2017
Discographie : 16 ème
Genres : Chanson française / Rock
Label : At(h)ome