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En ce premier week-end du mois de juillet, quel meilleur programme qu’un festival à Marseille ? Annoncé un peu tardivement, le tout nouveau festival Au large a réussi son baptême du feu en nous proposant des soirées hautes en couleurs et en émotions. Une première édition qui en appellera certainement beaucoup d’autres…!
Il est toujours aussi plaisant de retrouver la cité phocéenne pour aller assister à des concerts. Il fait beau, on longe la corniche au-dessus de la Méditerranée pour enfin aboutir au vallon qui prolonge l’anse de la fausse-monnaie. Le théâtre Silvain est là, dissimulé derrière la colline encerclée de pins. Ce lieu étonnant, caché de la vue des badauds est dédié à la scène depuis 1923. Et c’est ce théâtre de verdure qui a été choisi par l’Équipée pour se lancer dans son premier festival. Faisant écho à la Méditerranée toute proche, il nous invite Au Large avec une programmation étalée sur trois soirées. N’ayant pas pu assister à la soirée du vendredi, nous nous concentrerons sur les deux suivantes.
Jour 2 : Kemmler, Delgres et Amadou & Mariam
Ce samedi soir ensoleillé invite à prendre son temps malgré une ouverture assez précoce des lieux car le premier concert est programmé à 19h soit plus ou moins l’heure de l’apéro. Et les choses sont plutôt bien faites puisque le bar marseillais le Mounguy, associé à l’Équipée propose une belle sélection de punchs. Très bon point pour le festival et un petit faible pour le punch à l’Aloé Vera dont le succès ne faiblira pas du week-end. L’offre de nourriture, de qualité certes, est cependant très limitée. Mais que cela ne tienne, nous viendrons avec de quoi assurer un apéro correct le lendemain.
Mais revenons à la musique. Pour cette première soirée, c’est le marseillais Kemmler qui lance les hostilités. Devant une foule réduite mais composée de nombreux fans, le rappeur nous raconte sa vie avec des titres qui, mis bout à bout, dessinent son histoire. Ça parle beaucoup d’amour, de filles, de relations humaines et de succès. Il y a un côté fleur bleue à ces paroles qui dessinent une étonnante quête de romantisme dans un monde qu’on ressent pourtant beaucoup plus violent.
Après cette entrée en douceur, ce sont les incontournables Delgres que nous sommes ravis de retrouver sur scène. Changement de température immédiat avec le blues rock puissant du trio toujours aussi affuté et visiblement autant ravi que nous de retrouver la scène. Leur dernier album est sorti au début du printemps et nous attendions avec impatience de le voir interprété en live. Le format festival crée toujours des frustrations du fait de la durée limitée du set mais une bonne partie de l’album 4:00 AM est jouée dont les incontournables Aléas ou 4 Ed matem sortis en single ces derniers mois. Les titres sont toujours aussi engagés, militants, puissants et nous remuent de part leur interprétation toujours très habitée. Le premier album n’a pas été oublié avec des titres comme Mo Jodi ou Mr President que nous connaissons presque par cœur maintenant ! La joie est là aussi avec des titres très entrainants comme L’école que nous espérions secrètement voir figurer dans la set-list. Le public est conquis, même ceux qui ne semblaient pas connaître le groupe, et l’énergie partagée par Delgres semble bien avoir été reçue par une foule très réceptive. Ce qui est sûr, c’est que nous ne manquerons pas leur prochain concert si nous avons la chance d’avoir une date de tournée dans le Sud !
Le point d’orgue de cette soirée était sans aucun doute la venue d’Amadou & Mariam que tout le monde attendait. Et le couple n’a pas déçu en jouant ses titres les plus célèbres dont les incontournables Je pense à toi ou le dimanche à Bamako sans oublier l’étonnant Sabali composé avec Damon Albarn. Le couple semblait heureux d’être là et Mariam a régulièrement remercié le public dans plusieurs langues, telle une ambassadrice des nations unies.
Jour 3 : Isaya, Feu! Chatterton et Arnaud Rebotini
Changement d’ambiance pour ce troisième jour avec une belle file d’attente déjà formée devant l’entrée du théâtre Silvain à l’heure de l’ouverture des portes. On sent que la présence de Feu! Chatterton a dû mobiliser le public pour cette fin de week-end. C’est donc devant une arène bien remplie que se produiront les artistes ce soir.
Ce sont les jumelles fosséennes Isaya qui débutent la soirée. Musiciennes depuis toujours, les deux sœurs accompagnées de Mathieu Pernaud au clavier, nous embarquent dans un voyage à la frontière de la folk et des musiques tribales. Rempli d’une belle énergie, le trio nous a proposé un concert sans temps mort et plein d’envie. Un choix judicieux pour lancer la belle soirée qui nous attendait.
Comme nous pouvions nous y attendre, c’est bien Feu! Chatterton que le public attendait ce soir. Et c’est donc devant une foule conquise d’avance que le groupe a déroulé un set réduit à 10 titres (festival oblige) mais joué de manière joyeuse et intense. Si leur dernier album, Palais d’argile, était à l’honneur (Compagnons, Écran total, Avant le monde, Cantique, Libre et bien entendu Un monde nouveau), les anciens albums n’ont pas été oubliés, en particulier le premier avec La mort dans la pinède et la Malinche que le groupe prend un certain plaisir à jouer lors de chacun de ses concerts. Morceaux auxquels il faut ajouter Côté Concorde du même album. Arthur Teboul, charismatique leader de Feu! Chatterton, joue énormément avec le public pendant tout le concert en y prenant visiblement beaucoup de plaisir. Le set se termine sur le très poignant morceau Souvenir, issu de l’album précédent. Un titre qui nous dit que ce groupe est définitivement un des groupes à ne pas rater sur scène, en particulier cet automne quand Feu! Chatterton viendra défendre son Palais d’argile. Croisé dans la foule pendant le concert d’Arnaud Rebotini (qui n’a rien manqué de leur prestation), Raphaël de Pressigny, batteur du groupe, nous a confié qu’ils avaient joué sans avoir eu le temps de faire les balances à cause de la pluie qui ne s’est arrêtée qu’en début d’après-midi. Une absence dont n’a pas pâti le show.
A peine le temps de nous remettre de nos émotions que le boss Arnaud Rebotini prend possession de ses claviers et de la scène pour nous offrir un set dantesque devant un public ultra réceptif. Dans un style toujours aussi sobre, le musicien donne de la voix sur la plupart de ses morceaux. Toujours aussi fan de l’album Music components, nous sommes ravis de retrouver ses notes connues au cours du set. Un set qui permet à cette première édition du festival Au Large de finir en feu d’artifice !
Après ces deux belles soirées, nous ne pouvons que féliciter L’Equipée pour cette première édition réussie, pari d’autant plus osé dans une période cataclysmique pour le monde des arts vivants et pour les scènes de musiques actuelles. Nous espérons que cette réussite appellera une suite l’année prochaine dans ce lieu agréable et adapté à ce type d’événement.