Après une longue pause, les stéphanois de Redbong reviennent plus énervés avec leur quatrième opus « La crise sur le gâteau » et une sérieuse envie de taper une nouvelle fois du poing sur la tête. Toujours aussi évocateur qu’à l’accoutumée, le hip hop de Redbong est plus que jamais saignant. Ils nous avaient manqué ces gars-là !
Avec des titres d’albums tapageurs (« La France qui se lève tard… et qui t’emmerde ! », 2007, ou encore « Divisés (pour mieux régner) », 2009), Redbong ne pouvait pas se permettre de passer à côté de son sujet pour son quatrième essai ! « La crise sur le gâteau », près de 5 ans après son dernier opus en date, vient se présenter à nos oreilles aguicheuses, du haut de ses 11 titres qui ne demandent qu’à être passés au peigne fin…
Redbong a en tous cas décidé de rester dans la mouvance musicale, se délectant toujours de leur hip hop/electro terriblement efficace. Exit l’aspect conceptuel comme sur le précédent album, décliné en 18 titres sur fond de scénario cinématographique, cette fois, Redbong va à l’essentiel et se présente pour secouer les chaumières : si le côté hip hop est davantage marqué, avec un rythme d’ailleurs un peu plus lent, il n’en pas forcément moins lourd ! L’intro parle d’elle-même : dans un fracas métallique, Redbong annonce son retour et revient d’outre-tombe en prenant à contre-pied une célèbre série de zombies à coups de Rapping dead. Ces nouveaux rôdeurs de la Loire ne semblent vouloir épargner personne et leur marche, inexorablement longue, ne s’annonce pas de tout repos.
Derrière le masque de Picsou, l’évadé fiscal en prend pour son grade, en dégoupillant des « barrez-vous, mais cassez-vous, on fera sans vous, gardez vos sous, ne revenez pas et surtout étouffes toi avec ta thune oncle Picsou, passe à la caisse on sait bien que tu gagnes un fric fou ! ». Remonté à bloc, Redbong hurle sa hargne contre le système derrière le filtre de la France d’en bas, celle qu’on rabaisse, celle qu’on malmène… Et avec cette main prise sur les machines qui rend l’ambiance des compos encore plus oppressante, Redbong en profite pour régler ses comptes : de la célébrité ratée ou des délires de la télé-réalité (Gratos), Redbong s’en prend surtout au rap français (Fatcap, Rap Game of Thrones), le parodiant tout en revendiquant des paroles « D.A.N. » (Déterminées A Nuire) au lieu des « le rap, c’était mieux il y a 2 semaines, il parait, tu critiques mais tu rêves de faire pareil, à par ça tes textes sont fat et ton flow bien pourris… ».
Mais derrière ce vacarme se cache toujours un brûlot, un torchon imbibé d’essence qui ne demande qu’à s’embraser : à la manière d’anciens tracks (Concessions intimes, Contre…), « La crise sur le gâteau » renferme, aussi, ses odeurs Nauséabondes. Des vers acérés, les maux des sociétés sont brutalement balancés avec violence sans aucune retenue. D’une rare puissance, le track décroche sans difficulté le coeur de la cible des revendications avec une facilité déconcertante… Un son décidément brut de décoffrage, bien loin des faux semblants, qui donne le ton. Car quand les paroles s’énervent, le hip hop de Redbong mute et entame sa transformation sans crier garde. Lobotomisé par la télévision et les médias, Pas de thème explose de mille feux, entre drum’n’bass et déchéance, victime de sa propre existence.
En sommant « parez pour l’affrontement ? », Sondages perpétue cette triste tendance, entre manipulation étatique et médiatique sur l’opinion publique, les deux Mc’s s’en donnent à coeur joie, d’un ton affable, pour essayer de sauver ce qu’il reste des miettes de nos libertés individuelles. Ce n’est pas la chrysalide envoûtante, presque jazzy, qui enveloppe ce morceau, qui dira l’inverse… Car Redbong n’a jamais fait dans la demie-mesure, criant tout haut ce que beaucoup chantent tout bas ou continuent d’affubler (Stylé), Redbong pose sa griffe, encore et toujours, à coups de ‘rapcore’ qui ne s’enraille jamais ! Et c’est à travers l’ultime tourbillon de l’album que Redbong lève son doigt en l’air contre le monde du disque où l’industrie musicale renferme la déchéance humaine, celle du pognon, encore et toujours, comme seul lobby : Le bûcher des vanités attaque à tout va, des simples salles de concerts omnibulées à afficher complet tous les soirs en passant par les majors, pépinières d’artistes pré-mâchés, les stéphanois règlent leur compte !
Redbong aura mis du temps pour revenir, mais il n’a pas oublié d’illustrer son retour : « La crise sur le gâteau » dresse un état des lieux de nos sociétés modernes avec toujours autant de poigne, de beats affûtés et de textes criards de réalité. Une triste réalité.
Clip « Sondages » :
LA FICHE TECHNIQUE
Tracklist
1) Rapping dead
2) Picsou
3) Gratos
4) Fatcap (feat. DJ O’legg
5) Nauséabondes
6) Pas de thème
7) Flipper
8) Sondages
9) Rap Game of Thrones (feat. Mans, Romstic, Piloophaz, Skizominus Crew)
10) Stylé (feat. Requiem, DJ O’leg)
11) Le bûcher des vanités (feat. Tremelo Boy)
Sortie : 4 Juin 2014
Durée : 42 minutes
Album : 4ème
Genres : Rap / Electro
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