En ce lundi 4 septembre, la France a un parfum de reprise avec le traditionnel rush de la rentrée. Et comme chaque rentrée, c’est notre quotidien qui en prend un coup. La machine est repartie… il va falloir tenir. Il va surtout falloir arriver à brancher son casque, le visser sur ses oreilles et écouter le dernier petit prodige des écossais de Mogwai, « Every country’s sun ».
L’an dernier, Mogwai nous avait carrément envoûté avec « Atomic », la bande originale du documentaire de Marc Cousins consacré à la catastrophe d’Hiroshima (« Storyville: atomic – living in dread and promise »). Les tristes 70 ans de cette catastrophe passés, Mogwai est donc retourné aux fourneaux. Sur « Atomic », Mogwai nous avait habitué à des chaleurs suffocantes, un brûlot qui parvenait à faire jaillir la lumière du néant. Sur ce « Every country’s sun », Mogwai ne joue plus dans la même cours : même si leurs compos destinées aux BO restent, plus ou moins, dans le même univers que leurs opus personnels, les écossais tiennent à dissocier ces expériences artistiques. Pour preuve, la sortie de « Rave tapes » (2014) avait quelque peu désarçonné l’auditoire avec ses penchants électroniques.
Pour leur neuvième opus, les grands pionniers du post-rock ont décidé de s’appuyer sur le savant mélange opéré sur « Atomic » : l’ouverture Coolverine aurait d’ailleurs très bien pu y figurer tant elle contient toutes ses subtilités. Une progressive ascension vers les cieux de plus de 6 minutes, un petit séjour dans le cosmos avant une explosion des sens. Une première claque qui annonce d’emblée l’ambiance globale de l’album. Elle annonce surtout le retour des guitares qui s’étaient bien estompées sur l’opus précédent. Ici, elles ne demandent qu’à s’exprimer davantage, que ce soit un aller-simple pour Party in the dark (seul morceau un peu lisse) ou pour le tonitruant Battered at a scramble. Ce titre nous fait traverser plusieurs sensations : une première qui nous donne une sérieuse impression de flotter, une seconde qui nous happe de tout bord ! Les effluves de guitares épousent une batterie en fusion et la noyade est proche… C’est avec le souffle coupé que le périple se poursuit. Crossing the road material et Old poisons, boostés à l’adrénaline, nous empêchent d’avoir les idées claires tant Mogwai semble vouloir nous dire quelque chose. Les temps sont sombres, les éléments basculent dans une autre dimension et tout ne semble tenir qu’à un fil…
A mesure que le sol se dérobe sous nos pieds, l’aspect progressif prend toute son ampleur sur le très bien construit Don’t believe the fife. Profondeur des sonorités, changement de rythme et de vibration, Mogwai continue d’exceller dans un registre qu’il façonne à son image. Pourtant, les écossais ne cherchent pas à renier ce qui constitue aussi leur fameuse griffe : 20 size a une incroyable faculté de nous retourner la tête à coups de nappages de guitares et d’envolées, tout comme 1000 foot face, mélodieux à souhait, qui ne tombe pas dans la facilité.
En jonglant avec leurs univers, Mogwai continue ses expérimentations et avance les yeux fermés (ce n’est pas l’ambiant Aka 47 qui prouvera le contraire) : Brain sweeties est un délice, dompté par la basse, et l’évasion est totale. Le survol du monde et de ses plaies est sans limite alors que les machines saturent notre perception… pour mieux l’affiner. Avec une orchestration aussi millimétrée, Mogwai maintient notre attention. Celle-ci succombera sans résistance sur Every contry’s sun, le titre éponyme de l’album, qui nous empêche d’échapper à son étreinte. Si c’est ça le néant, cela vaut bien le coup d’y passer 56 minutes.
FICHE TECHNIQUE
Tracklist
1. Coolverine
2. Party in the dark
3. Brain sweeties
4. Crossing in the road material
5. Aka 47
6. 20 size
7. 1000 foot face
8. Don’t believe the fife
9. Battered at a scramble
10. Old poisons
11. Every country’s sun
Album : 9ème
Sortie : 1er septembre 2017
Genre : Post-rock
Label : Rock Action Records