Une semaine de grand soleil, d’arbres en fleurs et de gaieté en chœur : il ne nous manquait plus qu’une belle soirée de reggae pour ponctuer le retour de l’été. Les excellents Mediatone avaient pensé à tout : la Lyon Reggae Party investissait le Club Transbo avec Harrison Stafford & Brain Damage pour chanter le printemps des peuples.
La ferveur estivale se faisait déjà sentir avec la belle voix de William Brutus qui accompagnait la mousse fraîche sur la terrasse. Arrivés malheureusement après l’ouverture de Dub Silence, nous enchaînons directement avec le duo de chanteurs de Jahneration, qui a déroulé son set vitaminé avec énergie. Une belle partie du public était sans aucun doute venu pour apprécier le show de Théo et Ogach. Les deux parisiens réussissent le pari d’élargir les frontières du reggae, avec une plume et un flow aux influences largement hip-hop, à l’image d’un Biga*Ranx ou Naâman. Avec son duo de voix très complémentaire, Jahneration nous rappelle aussi nos années Dub Inc, qui ont d’ailleurs promu les deux MCs à leurs débuts en première partie de plusieurs Zenith. Dans un Club Transbo bien chaud, Jahneration déroule : les transitions sont fluides, la performance est parfaitement rôdée et on apprécie même les prises de risques musicales comme Deh Ya avec un reggae/dubstep très marqué.
Après un interlude sur la terrasse, le « Liberation Time » est venu. Devant un public un brin épars mais bouillant, Brain Damage et Harrison Stafford ont déroulé leur recette magique. Un des pionniers du dub français, en collaboration avec une des voix les plus puissantes du reggae roots mondial. Portés par une harmonie spontanée, naturelle, les deux artistes accordent leurs instruments respectifs (les machines de Brain Damage, les cordes vocales d’Harrison) pour produire une euphonie musicale nouvelle. Brain Damage se prend la tête à deux mains, comme possédé par le rythme de sa basse. Avec Everyone A Christ et Pick Up Yourself, Harrison danse, Harrison chante, avec une ferveur qui transcende, avec une humanité débordante.
Entre les chansons, le Professor, mué en porte-parole des luttes actuelles, exhorte le public à se lever pour ses droits et à souffler le vent de libération qui fait vaciller les puissants. De son côté Brain Damage observe le petit barbu pour caler ses rythmiques sur les envolées lyriques du californien. La complicité entre les deux hommes est évidente et chacun prend le soin de mettre en valeur le travail de l’autre : en intro et en outro, Brain Damage envoie son dub très précis, très puissant qui casse la rythmique et fracasse le public. Au coeur du concert, Harrison Stafford prend, lui aussi, seul les commandes pour faire vibrer sa voix. Après 1h15 de concert, le public hurle le rappel mais il est déjà minuit et le Transbordeur va fermer. Un brin frustrés mais terriblement inspirés, nous saluons les deux artistes pour leur engagement, leur harmonie, leur passion. Après 20 ans de carrière, Harrison Stafford comme Brain Damage continuent de regorger de créativité et de faire vivre un perpétuel mouvement, politique, philosophique et surtout musical.