Nous étions en nombre ce weekend à la fête de l’Humanité. Rangé les casquettes de chroniqueurs, nous étions là en tant que festivaliers, que militants, qu’humains. Mais chassez le naturel, il revient au galop ! Alors c’est sur nos grands chevaux que nous avons eu la chance de rencontrer Alice Burguière, membre des Ogres de Barback (qui se produisaient à la fête de l’Huma avec Un Air Deux Familles) pour passer un bon moment de simplicité, parler d’engagement et de musique, d’Ogres et de Pierre Perret !
Quinze ans après, les deux familles se sont retrouvées !
Ils ont marqué une époque, avec Jojo et leur chapiteau. Un air Deux Familles c’est une vieille idylle qui a repris du service cette année : « C’était au départ parce qu’on trouvait ça rigolo, quinze ans après, de se retrouver, explique Alice. C’est surtout Fred (ndlr : des Ogres) et Laulo (ndlr : des Hurlements) qui se sont retrouvés pour la tournée des Hurlements de Léo chantent Mano Solo, et puis après on s’est dit : ‘’pourquoi pas’’ .
Au final une tournée imposante, (et un nouveau disque Live, chroniqué ICI) une énergie toujours considérable et des dizaines de milliers de fans ravis de pouvoir revoir, ou simplement voir pour les plus jeunes, sur scène, cette joyeuse équipe qui ne compte pas son énergie. Les hommages fusent sur scène, les références aussi, on y entend Mano Solo, Bérurier Noir, parfois La Rue Ketanou, Manu Chao…
Ce 16 septembre, les deux familles ponctuaient leur tournée de la plus belle des manières, sur la grande scène de la fête de l’Humanité, devant une foule monstre. Alors à quand la prochaine ? « On verra dans quinze ans où on en est » sourit Alice. Reste déjà de beaux souvenirs.
La fête de l’Huma, un moment important pour ces enfants de la banlieue.
Jouer à la fête de l’Humanité n’est jamais anodin, dans cet antre où se côtoient les révoltes, révoltes que portent bien souvent Les Ogres de Barback. Malgré tout, pour Alice, le groupe veut garder son indépendance et ne pas être rattaché à un parti politique en particulier : « Il y des groupes plus engagés que nous. Alors par contre on est concerné par tout ce qui se passe, mais on ne veut pas être associés à un parti ». Pas d’étiquette donc, mais on connait les valeurs du groupe et leur capacité à porter des messages avec cœur et cohérence. Ne serait-ce pas ça, être engagé ?
Pour les quatre frères et sœurs, venir ici à La Courneuve est quelque chose qui remonte à beaucoup plus loin que leur passage sur les planches : « La fête de l’Huma c’est un vrai truc, avant on y allait tous les ans, quand on était banlieusards. On est très touchés de jouer ici, c’est notre adolescence, on y a vu la Mano Negra et tant de groupes. C’est un vrai moment militant et culturel ». Même si l’artiste reconnait préférer les petites scènes, les petits stands où ils ont déjà poussé la chansonnette, et où les amis se produisent, en marge des « superstars » en tête d’affiche.
La simplicité des Ogres de Barback (et des Hurlements d’Léo, leur autre famille) dénote un peu, mais elle fait du bien dans cette cohue où les « superstars » semblent inaccessibles, et bien déconnectés.
Alors c’est sûr, ce n’est pas la dernière fois que l’on apercevra le nez des Ogres de Barback à la fête de l’Huma, que ce soit sur le petit stand d’Argenteuil ou sur la grande scène, pour chanter et jouer des instruments, ou simplement discuter et boire un café en mangeant un bonbon. C’est aussi ça, la fête de l’Humanité.
Pierre Perret, si proche si loin : un hommage et une admiration véritable !
Il est annoncé sur le Musicodrome depuis plusieurs semaines. Les quatre trublions de la chanson sont de mèche avec le Pierrot depuis un long moment. Leurs reprises du Café du Canal, ou de Lily sont entonnées depuis bien longtemps dans les salles de concerts. Mais un hommage leur paraissait naturel : « C’est un artiste qu’on admire beaucoup, explique Alice. Il a plein de belles chansons, pas du tout connues, qu’on veut faire découvrir à notre génération. »
Si le groupe s’est retrouvé proche de Pierre Perret c’est aussi dû aux différentes similitudes de leurs parcours : « L’indépendance déjà, et puis en discutant avec lui on a parlé des ‘’malheurs’’ de la profession, et on s’est rendu compte qu’on avait des parcours similaires ». Les embûches également, comme la difficulté à être programmé sur les radios commerciales, et à toucher le grand public. Mais Alice relativise : « Au début ça nous touchait, ça peut nous énerver, mais l’important c’est les gens dans les salles ! »
Contrairement aux derniers albums où les copains étaient invités, sur ce disque le groupe a décidé d’innover : « On a décidé d’inviter de nouvelles personnes sur ce disque », explique Alice. « Des gens qu’on ne connaissait pas mais qu’on avait envie d’inviter. Comme par exemple François Morel, Féfé ou Flavia Coelho. C’est marrant, Flavia Coelho on ne la connaissait pas mais elle aimait beaucoup Mon P’tit loup, alors c’est elle qui chantera celle-là. Avec des airs reggae, alors que l’on a pas du tout l’habitude d’en faire. »
Malgré tout, il reste quelques copains qu’on ne peut pas oublier : « C’est vrai que Loïc Lantoine est aussi sur le CD, avec The Very Big Experimental Toubifri Orchestra. Pour cette chanson, c’est eux qui font l’instrumentation ». Les titres proposés aux groupes ont tous trouvé preneurs, à l’exception de Massilia Sound System : « On leur a proposé trois chansons, et ils nous ont répondu en nous disant : ‘’bon ben on en a choisi une autre : Tonton Cristobal ‘’ », explique Alice en souriant.
Cette fois-ci pas de tournée pour cet album, simplement un concert pour fêter les 60 ans de carrière de l’artiste, où les Ogres y joueront quelques chansons avec lui. En toute amitié. Mais de tout ça, nous vous en reparlerons tout bientôt !
Des ogres qui grossissent en totale indépendance, un vrai choix de vie.
Dans le paysage musical français, ils sont rares les groupes à pouvoir se targuer d’être 100% indépendants. Les Ogres de Barback ont fait ce choix, et en plus des quatre musiciens sur scène, ils sont trois à « encadrer » cette joyeuse fratrie pour pouvoir mener une vie et une carrière tout en choix et en liberté. Alors comme le dit Alice, cela peut parfois leur fermer les portes : « Certains gros festivals ne nous programment pas, parce que nous sommes indépendants justement. ». Mais chacune des dates du groupe est choisie et validée par l’ensemble de l’équipe : « Si il y a certaines salles ou certains festivals où nous ne voulons pas ou plus jouer, pour une raison ou une autre, nous nous laissons le droit de refuser » affirme Alice. Mais cette liberté permet aussi au groupe de se lancer dans des projets où personne ne serait prêt à les suivre, pour une réussite tout le temps au rendez-vous : « Quand on a voulu faire un album pour les enfants, personne n’y croyait, et puis on l’a fait et ça marché, et il y a eu trois albums de Pitto’chat ».
En plus de leur propre activité, le Label Irfan s’est lancé dans la distribution de certains artistes : « Au début nous avons tenté de distribuer certains artistes. Mais ça a été très difficile pour certains d’entre eux, ça n’a pas marché du tout, explique Alice. La distribution c’est un travail compliqué, il y a tout un vrai cheminement, des réseaux à avoir, et tout ça se fait lentement. ». Certaines belles réussites sont passées par le Label Irfan, comme le dernier en date, l’album de Fréderic Fromet sorti il y a plus d’un an !
C’est tout ça, les Ogres, une équipe soudée depuis 20 ans, de la confiance, de l’envie, des copains et des projets à foison. On ne dira pas « à ne plus savoir qu’en faire », car ils arrivent toujours à en faire quelque chose !
« C’est un travail de fou, mais nous sommes complètement libres, on fait ce qui nous plait, et puis on s’éclate vraiment » conclu Alice. Pourvu que ça dure ! En attendant de nouvelles aventures, les Ogres De Barback seront à nouveau sur les routes à l’automne, avec le Bal Brotto Lopez. Un nouveau spectacle à voir, ou à revoir !
Interview réalisée par Clemonstro, Tetex et P’tit Bapt’ (crédits photos : Photos Nomades)