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L’année 2020 aurait dû être une année de fête pour les Internationales de la Guitare. Le Covid-19 en a décidé autrement. Mais pas question de baisser les bras pour son directeur Talaat el Singaby et son équipe, bien décidés à faire vivre la culture sur le territoire occitan.
Décidément, l’année 2020 restera gravée dans les mémoires. Si la grande majorité des événements culturels a été annulée depuis le mois de mars, certains festivals ont décidé de résister coûte que coûte et de maintenir une programmation de qualité malgré les nombreuses contraintes à intégrer. C’est le cas des Internationales de la Guitare (IG) qui existent depuis 25 ans et qui avaient prévu une grande fête pour célébrer ce quart de siècle. Après la stupeur et les annonces gouvernementales incompréhensibles, il fallait réagir et les choses ont été claires pour les IG : « on n’annulera pas le festival » – un axe de travail volontaire et engagé.
Comme nous le précise Julia Parra, attachée de presse de l’événement, les IG, ce n’est pas que le festival de musique mais bien trois axes indissociables :
- Une bourse de recherche à l’innovation décernée à un luthier régional pour la réalisation d’une guitare à caractère innovant, décernée lors du salon dédié,
- Des ateliers destinés à un public scolaire et défavorisé dont une partie s’est déroulée cet été à destination des enfants qui ne pouvaient partir en vacances,
- Un festival de musique à la fois éclectique et populaire.
Le salon a finalement pu se tenir dans les locaux de la Région à Toulouse (31), avec des ateliers dans l’air du temps tels que « quelles méthodes pour désinfecter ses instruments ? » nous raconte Julia. Et le public a bien été présent, ce qui est un signe positif.
Un festival sous tension
Mais qu’en est-il du festival ? « Il faut rester vigilant, cela nous permet de ne pas être surpris par une annulation » nous explique Talaat el Singaby. Car les annonces gouvernementales et les prises de décision préfectorales ont de quoi déstabiliser n’importe quel organisateur. « La décision d’annulation peut tomber jusqu’à 72h avant l’événement. Du coup, nous avons rédigé une déclaration par événement, histoire que chaque concert puisse être traité de manière indépendante sans compromettre le reste de la programmation » nous précise Julia. Et puis les jauges sont fortement réduites (50 à 250 personnes) et en places assises. « La programmation a été réfléchie dans ce sens, de manière à faire des choses réalisables ».
Aux difficultés déjà énoncées, s’ajoute l’indisponibilité des salles habituellement utilisées comme le Rockstore (de Montpellier, fermé depuis mars) ou non utilisables pour des raisons de jauge réduite comme l’opéra Berlioz (toujours dans la cité héraultaise). Mais ce n’est pas cela qui a découragé l’équipe surmotivée des IG qui, comme le précise Talaat el Singaby, « chevauche des tigres, des dragons et d’autres animaux mythiques depuis 25 ans et n’a pas attendu la parole présidentielle pour se réinventer« .
Des concerts attendus et un public fidèle
Que ce soit en Lozère, dans les Pyrénées-Orientales ou sur le territoire de la Métropole de Montpellier, les concerts prévus ont eu lieu, dans le Sacro-saint respect des normes sanitaires. Plusieurs d’entre-eux ont même affiché complet bien avant leur tenue, démontrant, s’il le fallait, l’importance de maintenir des concerts sur le territoire. Il faut tout de même bien reconnaître que l’ambiance dans le public a quelque peu changé. Les musiciens doivent faire face à une foule de gens masqués écartés les uns des autres et assis, bien entendu.
Autre moment d’angoisse pour l’équipe, l’organisation des « 24h démentes » à Montpellier (34), soit 9 concerts dans 9 lieux différents pendant deux jours. Et il en aura fallu de la patience et de la motivation pour maintenir ces événements dans des lieux en extérieur au quatre coins de la ville. Un pari largement réussi avec un public au rendez-vous et des artistes heureux de se produire devant de « vrais » gens alors que les conditions météorologiques n’ont pas facilité la tâche ! Nous retiendrons particulièrement les performances de David Lafore, One Rusty Band et Orcival qui nous ont séduit.
La culture, un besoin vital
Face aux annulations qui se sont enchainées depuis le début du printemps, il est important de féliciter et soutenir les acteurs culturels qui n’ont pas jeté l’éponge. Ce faisant, ils ont permis à des artistes de se produire devant un public et de faire vivre l’ensemble de l’écosystème du spectacle vivant, des techniciens aux agents de sécurité en passant par les attaché.e.s de presse ou les bénévoles. Il est plus que jamais important de faire vivre la culture et d’organiser des concerts même si les conditions sont loin de nous faire rêver. Et il est important que nous, public, soutenions ces acteurs afin que la chute ne soit pas trop dure dans quelques mois et que nous n’ayons plus que nos yeux pour pleurer…
C’est ce que réaffirme Talaat el Singaby en expliquant que « la culture est au cœur du pacte républicain. Le meilleur remède contre le « séparatisme », ce sont l’éducation et la culture. Or, ce sont les ministères les plus impactés par la crise« . Aujourd’hui le spectacle vivant ne récolte que les miettes d’une relance présentée comme essentielle pour le maintien de l’économie. Il est urgent que les pouvoirs publics s’engagent à sauver ce qui existe encore avant que tout ne s’écroule pour de bon.