Les soirées se suivent et se ressemblent pour Paloma. Il faut dire que la programmation de la cuvée 2016/2017 de la salle aurait presque de quoi faire pâlir son voisin montpelliérain ! En ce vendredi soir, ce sont les bretons de Matmatah qui posent leurs valises dans la chic Grande Salle de Paloma. Et forcément, le concert est sold out !
Une fois n’est pas coutume, une partie du Musicodrome est arrivée en retard et nous ne pourrons pas nous attarder sur la première partie de la soirée, en l’occurrence Lord Ruby. Entre un verre et quelques papotages, il en ressortira que Lord Ruby a fait le boulot, sur fond pop/rock, et qu’il a particulièrement marqué les esprits par ses changements de rythmes et d’intensité… qui ont permis de dévoiler deux facettes à la fois opposées et complémentaires du groupe. Nous ne pourrons malheureusement pas en dire plus !
Pour la suite des hostilités, c’est bel et bien Matmatah qui est attendu au tournant. Le premier fait marquant est le métissage du public : on s’en doutait un peu, mais c’est bien un public multi-générationnel qui s’est donné rendez-vous ce soir. Il y a ceux de la grande époque, avec quelques cheveux blancs (pardon messieurs), mais aussi des plus jeunes qui se disent que c’est un groupe à voir au moins une fois dans sa vie !
Le concert finit par commencer. Des applaudissements, mais pas l’hystérie non plus. Musicalement, neuf années ont passées depuis leur fameuse « La cerise ». Tout d’abord, il semble Matmatah ne soit jamais vraiment partie. La foi est intacte, l’enthousiasme aussi, et le temps n’a pas eu de conséquences sur la voix si douce de Tristan Nihouarn. L’ouverture du concert, par Petite frappe, fait le lien avec leur nouvel opus (« Plates coutures », 2017) sans que Paloma ne réponde complètement. Et ce constat va perdurer sur les morceaux suivants alors que le groupe propose une plongée dans ses vieux albums : entre un classique Quelques sourires et des saillants Il fait beau sur la France/Gotta go now. Peut-être que ces interprétations, très proches des versions studio, n’ont pas permis de chauffer suffisamment le public de Paloma.
Après ces brèves constations, la machine a (enfin) fini par se lancer : d’abord, le profond Marée haute a permis de remettre les idées sombres à leur place. Ensuite, la transformation de la légère Lésine pas en tube live à danser a eu l’effet escompté. Avec un public débridé et un groupe qui sent bien que le vent est en train de tourner, le yo-yo entre les périodes de Matmatah peut débuter : l’incontournable Emma, le posé Au conditionnel et la fameuse Cerise enchantent la foule. Entre deux ou trois revendications, Matmatah desserre au passage le frein à main et paraît plus s’éclater sur ces compos qu’en début de concert.
Malgré ce retour dans le passé, Matmatah ne s’est d’ailleurs pas cantonné, pour son retour, à nous proposer une tournée d’anthologie : « Plates coutures » a pu s’exprimer sur deux bons tiers sur le concert. Intercalés astucieusement entre les incontournables du groupe, les Retour à la normale ou autres Nous y sommes ont apportés la fraîcheur de la nouveauté. L’énergie et les « lalapapa » de Retour à la normale ont fait sentir la poudre dans l’arsenal nîmois ! Les quelques allers-retours aux côtés de Crépuscule dandy et du Festin de Bianca ne pourront pas prouver le contraire…
Matmatah est au niveau, c’est indéniable. Entre la bouteille accumulée et des musiciens de haut vol (mention spéciale au batteur), le rendu est solide. Quand déboule Lambé an dro, forcément, l’hystérie pointe son nez. Dommage que le premier rappel joue les invités surprise. Le retour n’en sera que meilleur : Toboggan, ballade rock psyché de plus de 6 minutes sur « Plates coutures », s’invite aussi à la fête. Surprenant choix. Pourtant, il faut bien avouer que ce morceau, planant à souhait, donne une sacrée dimension atmosphérique au concert. L’entêtant et inusable Derrière ton dos (et ses « oh oh oh ooooh ») remet du baume au cœur avant que L’apologie, hit ancestral de Matmatah sur « La ouache » (1998), déchaîne les passions !
Il n’en faudra pas moins d’un second rappel pour recréer l’espoir. Un espoir de courte durée puisque Matmatah finira en acoustique, avec la belle Peshmerga, qui aura permis au groupe de rappeler des valeurs fondamentales à nos sociétés, malades de l’intérieur, qu’un retour juste des choses est encore possible.