A l’occasion du concert de Rod Anton and the Ligerians à l’Astrolabe le 8 mars dernier, nous avons pu prendre le temps de lui poser quelques questions à la fin du concert.
J’ai cru comprendre que tu avais débuté sur Orléans, qu’est ce que ça fait de revenir jouer ici, en famille?
Rod Anton : Franchement super, comme je le disais tout à l’heure quand j’étais sur scène, je me sens un peu à la maison ici. Dans le public il y a plein de potes, tu fais des clins d’œil pendant le show, c’est hyper agréable. C’est vrai que j’ai fais mes armes ici du coup les gens connaissent, donc forcément quand tu fais un concert ça ramène du monde, les gens connaissent déjà le son … Du coup, c’est vrai que quand on joue ici on passe des super moments à l’image de ce soir. C’était cool de voir aussi qu’il y avait des gens de tous les âges.
On a beaucoup apprécié lors du concert ta reprise de Cesaria Evora, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur tes grandes inspirations musicales ? Je suppose qu’il y en a pas mal ?
Rod Anton : Ouais j’en ai plein, j’écoute plein de musiques différentes… Après, étant d’origine portugaise (mes deux parents sont portugais), j’ai toujours écouté la musique un peu latine en grandissant. Ma grand mère chantait le fado, du coup je pense que même encore aujourd’hui dans mon reggae ça s’entend un peu. C’est une culture musicale qui m’a beaucoup parlé et dans laquelle j’ai grandi donc c’est vrai que ça m’est venu assez naturellement. La musique brésilienne aussi, genre Bossa Nova ou la vieille samba par exemple, ce sont des choses que j’ai beaucoup écouté, tout ce qui est Jorge Ben ou Samba Rock par exemple.
Et niveau reggae ?
Rod Anton : Et niveau reggae, pour moi, l’âge d’or c’est vraiment la deuxième partie des années 70, sans rester bloqué sur des dates car il y a eu des choses incroyables dans les années 80, mais vraiment toue la période Rockers, genre fin des années 70. Ça, c’est vraiment ce qui me plait. Les grosses harmonies vocales, Les Congos, Horace Andy, Viceroys et niveau son j’aime bien vraiment le rockers donc la fin seventies début eighties genre Black Uhuru avec Sly and Robbie, même les albums de Gainsbourg aussi pour rester dans le français. Pour le concert de ce soir, on a bossé cette semaine sur un nouvel arrangement pour un des morceaux de « Reasonin » qui s’appelle Caribbean Queen et du coup j’ai demandé aux gars, je leur ai dis « jouez moi un truc à la Sly and Robbie et Gainsbourg ». Et du coup c’est vrai que c’est hyper agréable pour nous car c’est un son qu’on a beaucoup joué et je dois avouer que j’en ai un peu marre de le jouer. C’est vrai que de le ré-arranger complètement différemment avec des sons que t’as pas l’habitude de jouer ça donne un peu de fraîcheur et nous on y prend plus plaisir !
Rod Anton et Cedric Myton du groupe The congos
Qu’est ce que tu as dans les start ? Un nouvel album ? Un nouveau titre à venir ?
Rod Anton : On a le morceau Sodade que l’on a joué ce soir qui est prévu pour le mois prochain. On était tout seul à le jouer ce soir, mais en fait sur le morceau avec moi il y a les Congos. L’année dernière, on a fait une tournée ensemble au Brésil où je faisais leur première partie et un soir à l’hôtel je leur ai dis « je suis en train de bosser sur un nouveau morceau, un morceau qui parle d’esclavage ». Je leur ai parlé de Cesaria et ça leur a parlé à fond. On était à l’hôtel mais j’avais emmené un petit studio portable avec moi : je les ai enregistré sur le morceau ! Ça sort le mois prochain, il y a une version avec les voix et un dub.
Est-ce que cela préfigure un éventuel nouvel album ?
Rod Anton : On travaille sur un nouvel album mais avec une formation un peu différente. En fait, on à déjà fait quelques concerts et même quelques vidéos avec cette formation. Sur celle-ci, on est trois et c’est un truc un peu plus rub a dub, avec des sons un peu plus digitales dans l’esprit. Ben, le percussionniste des Ligerians, a tous les morceaux pré-enregistrés en multi-piste et il mixe tout en direct, un peu à la façon King Tubby’s, il met plein d’effets dessus. Ensuite, il y a Gabriel, le guitariste des Ligerians, qui est à la basse. Donc ça donne quelque chose de complètement nouveau, avec des arrangements beaucoup plus épurés, et on essaie de faire un truc un peu plus dansant mais avec quand même des phases un peu dubrise. Le but est de sortir un nouvel album avec cette formation sur l’année 2019 si on peut. Ça nous permet aussi de pouvoir jouer dans plein d’endroits où l’on ne peut pas forcement aller jouer avec le band, c’est plus simple !
En terme de concert/festival, tu as des dates à venir un peu cette année ?
Rod Anton : J’avoue qu’on a décidé de prendre tous un peu de temps avec le crew. Il y en a plein qui sont devenus papa, moi-même je viens d’avoir un deuxième enfant… C’est super et il faut pouvoir aussi en profiter un peu. L’année dernière, j’ai pas été beaucoup présent notamment avec la tournée au Brésil. Et vu qu’on avait pas une tournée folle, on s’est dit qu’on allait faire seulement quelques dates cruciales pendant l’été pour repartir plutôt à fond à l’automne tout en bouclant la production de nouveaux titres. Donc à venir, plutôt du studio et moins de dates.
Les Ligerians, eux, n’arrêtent absolument pas de bosser car ce son des acharnés ! Ils bossent avec Joe Pilgrim, ils vont bosser avec les jamaïcains, ils vont backer Glen Washington sous peu, Linval Thomson… Ça commence à prendre pas mal. Les gens savent que si on veut un backing band sérieux en France, les Ligerians sont là !
Concernant ton dernier album « Ubatuba » et ton attachement au Brésil, est-ce que tu peux nous en dire plus ?
Rod Anton : Le Brésil, c’est un peu mon pays de cœur… J’y suis allé une première fois en 2013. C’est un pays avec lequel j’avais déjà quelques attaches avec mes parents et, depuis que je suis petit, on a des amis brésiliens. Donc j’avais déjà un premier attachement pour ce pays et sa culture via ces amis avec qui j’avais grandi. Je me rappelle du premier voyage, c’était incroyable. Je suis parti tout seul avec mon sac à dos, j’ai connecté des gens via internet, ils m’ont dis « vas-y on t’organise une tournée, viens ! » puis voila ! J’ai pris mon sac à dos et je suis parti un peu sans savoir où j’allais. J’ai atterri à Sao Paulo, on a fait une petite tournée. Faut imaginer le truc : tu fais une répète avec les zikos et puis tu pars direct en tournée ! Donc c’est un peu spécial mais ce sont que de bonnes vibes !
Après, on est beaucoup resté à Sao Paulo, j’en pouvais plus au bout d’un moment : trop de béton pour moi ! Il y en a un des musiciens qui m’a invité dans la maison de son grand père. Une petite bicoque dans un village en bord de mer à trois-quatre heures de route de Sao Paulo. On est parti et c’est vrai que ça a été la révélation ! C’est un endroit hyper mystique, un peu fou, en mode village de pêcheurs mais hyper grand. Ça s’étendait sur 80 km de long donc c’était énorme ! Ensuite, sur une borne toute fine, il y avait la forêt vierge et à côté la mer : c’est d’ailleurs un des seuls endroits au Brésil où la forêt vierge rencontre la mer. T’as plein de plages désertes où c’est direct la jungle à coté. Et puis tu fais deux heures de marche dans la jungle et tu tombes sur des cascades incroyables, dans des endroits où il n’y a personne…
C’est ça « Ubatuba » du coup ? C’est ce qui t’as inspiré le nom de l’album ?
Rod Anton : Ubatuba c’est le nom de l’endroit ouais. Les gens étaient vraiment cool, je me suis fait plein de potes là-bas. Niveau spiritualité, j’ai vraiment pris des grosses vibes. On a fait des traking pieds nus dans la forêt… tu te dis que des araignées de oufs ou des serpents peuvent surgir à tout moment mais tu n’y penses même pas car tu es vraiment connecté avec la nature qui t’entoure. Pour rendre hommage à Ubatuba et aux amis que j’ai là-bas, j’ai fait ce morceau, et puis quand tu cherches le nom d’un album, des fois tu ne sais pas trop quoi mettre. Quand j’ai repensé à Ubatuba, je me suis dis que ça serait vraiment un super hommage !