16e édition pour le mammouth des Rocktambules de Rousson près d’Alès dans le Gard. En ce vendredi soir, il plane comme un air de mois de novembre dans les Près de Landas où le froid (et surtout le vent) ont décidé de se joindre à la fête. Si les Rocktambules n’ont pas fait le plein en terme d’affluence, le rock était bel et bien de retour à Rousson. Une soirée consacrée aux furieux et aux furieuses qui rappelait certains airs de l’école buissonnière.
On a tous, oui tous, déjà fait l’école buissonnière. Cette année encore, on ne déroge pas à cette tradition : nous nous sommes tous donnés rendez-vous derrière le Préhistorama, bien encerclés par la barrière végétale roussonnaise. En pleine garrigue, presque à l’abri des regards, nombreux sont ceux ayant eu la même idée que nous : ce soir, nous allons braver le froid (même si nous sommes sudistes), à l’aide de musique et de bonnes vibrations. Le programme est chargé : trois petits groupes tremplin en guise d’apéritif (il est où le vin chaud ?) en compagnie des agités Byll’s, Belphegorz et Kombur ; avant de passer à la première chose sérieuse, Bottle Next. Arf, le soleil se couche.
Bottle Next prépare ses antisèches
Faire l’école buissonnière n’empêche pas de garder un oeil sur les bons principes. Si le duo n’a plus du tout l’âge de passer le bac, les deux gaillards avaient comme mission de rappeler au public comment garder en mémoire ces vieilles sonorités folk/rock que l’on retrouve davantage dans les vieilles contrées américaines. La composition est ultra-classique avec un combo batterie et guitare electro/acoustique. Selon les morceaux, un côté jazzy imprègne les compos avec des séquences au saxo. Avec un line up cruellement simple, il ressort des sonorités entre John Butler Trio, du blues et du rock progressif. Avec la voix éraillée et sulfureuse de Pierre Rettien au chant, on se croirait en train de se secouer un p’tit Heymoonshaker. Un show carré et maîtrisé pour Bottle Next, c’est un peu le calme avant la tempête… Derrière, Bagdad Rodéo et Mass Hystéria se préparent. Le public a répondu calmement à ce clairon mais derrière, la cavalerie approche. Prenez des notes les enfants, le baccalauréat approche… même s’il y a un temps pour tout.
Bagdad Rodéo, les joyeux cancres
Ils étaient déjà venus en 2011 et avaient provoqué un véritable raz-de-marée alors que les festivaliers étaient majoritairement venus pour No One Is Innocent. Cette fois, leur retour est accompagné d’un nouvel album, tout frais, sorti en début d’année 2013. La formule reste inchangée : une gouache énorme, des paroles toujours aussi rentre-dedans en provoquant à tout va.
Entre cancres, on ne peut qu’apprécier cette débilutude profonde comme sur La Farandole et son refrain insupportable (« nanananaaaa ») sur fond de rock poisseux. Impossible de ne pas se prêter au jeu de leur fameux Super Connard ! Grossiers et très fins, Bagdad Rodéo peut porter un double bonnet d’âne sans crainte : entre ses blagues pré-pubères, ses histoires de sexe et ses déboires d’alcool, Bagdad Rodéo excelle. Sex, drug and rock’n’roll, les guitares fusent sur le track éponyme bien fat « bienvenue à Bagdad on est toujours en ville, on a pendus Saddam au nom de Dieu et de missiles qu’il planquait sous le sable de son garage à vélo, mais il faut toujours un coupable pour payer le prix de nos rodéos ». Les skuds jonglent entre les albums, rien n’est oublié. Entre des histoires salaces sur La Ménagère, on découvre les penchants pervers de Bagdad Rodéo…mais nous pouvons aussi garder notre regard d’enfant sur Dis Moi Papa, « comment ils font ces chanteurs de variété, comment ils font pour faire des disques sans les avoir composé ? ».
Toujours emballés et jamais à sec d’humour, on notera les nombreuses références avec un petit passage punk de Jésus Reviens qui ne laissa personne insensible. L’acharnement du chanteur à vouloir joindre le public à la fête est tout aussi remarqué. Après avoir fait monter les demoiselles sur scène sur… J’aime pas les filles, quoi de mieux que de se jeter dans la foule et lancer un magnifique battle en pleine fosse ? Bref, pour avoir endosser le costume de cancres durant cette soirée, on peut dire que Bagdad Rodéo, comme en 2011, a une nouvelle fois géré. L’école buissonnière dans toute sa splendeur.
Mass Hystéria, le maître d’école
Entre les cancres et les antisèches, l’école buissonnière a malheureusement une fin. On finit tous par se faire rattraper par nos conneries, un jour ou l’autre. Mass Hystéria, en pleine tournée anniversaire de ses 20 ans d’activité, allait vite montrer qu’il n’était pas là pour plaisanter. Avec son dernier album en date, « L’armée des Ombres » (2012), qui sonne comme un retour aux sources, on s’attendait à rencontrer une véritable machine de guerre. Aucun doute là dessus, la baguette a bien été tenue par Mass Hystéria. Le son est lourd, le son est bon, les paroles de Mouss sont tout à fait audibles et, malgré la puissance du show, tout est bien huilé pour ce concert en extérieur. Et surtout, les puristes l’auront noté : Mass Hystéria a réinjecté ses fameuses ondes digitales sur tout son show… à l’ancienne ! Seul hic, la mayonnaise est retombée à cause du froid. Il ne restait plus grand monde devant la scène passé 1h…
Mouss l’a dit lui-même en plein show : « à tous ceux qui sont à encore l’école, ne lâchez pas l’affaire : cultivez-vous ! ». L’énorme Knowlege Is Power en porte drapeau, Mass Hystéria s’est offert un bain de jouvence de la bonne époque à coups de Mass Protect, Donnez Vous la Peine à la sauce The Prodigy et Smack By Bitch Up ! Riffs tapageurs pour véritable rouleau compresseur, Mass Hystéria s’est d’abord défoulée sur ses nouvelles compos taillées pour le live (Positif à Bloc, Même Si J’explose, Tout Doit Disparaître, Serum Barbare) et surtout ses deux nouveaux cocktails molotov maison, L’Homme S’entête et l’énorme Vertiges des Mondes. Ce dernier faisant étonnamment penser au brûlot militaire P4, il fut astucieusement glissé dans le set. Il a gardé toute sa fougue et n’a pas pris une ride…
Résolu à proposer sa setlist la plus nerveuse de ces dix dernières années, Mass Hystéria a déroulé le grand jeu : pas de quartier pour ceux qui n’aiment pas l’histoire sur Babylone ou Une Somme de Détails, aucune issue n’est possible pour les cancres en sciences éco sur World on Fire, il n’y a pas de passe droit. Pourtant, on garde tous une part de furieux en nous, de révolte… Tous convaincus de provoquer la Contraddiction « provoquez provoquez la contraddiction… pour gagner gagner la raison ! », le Respect (To The Dancefloor) ne se gagne qu’en cours de dance/métal pourtant, un dernier assaut est là, l’ultime. Furia ! Attendez mon signal… « un, dos, tres, quatro ! (…) Dans le cerveau, on met le feu dans le cerveau ! ».
Deuxième vague ce soir, à partir de 19h. Raoul Petite, Didier Wampas, Fatals Picards et Raspigaous ont comme mission de tenir la barre… Verdict demain !