Wasaru : « Sadtimes », portrait d’une société malmenée

5 min de lecture
Wasaru Sadtimes 2016

Repéré dans un premier temps suite à plusieurs réalisations de clip pour Brain Damage, Le Peuple de l’Herbe ou encore Kaly Live Dub, Le Musicodrome s’est cette fois intéressé d’un peu plus près à Wasaru pour ses créations musicales. Après une première plongée en eaux troubles dans des méandres trip hop pêchues, « Sadtimes » change de décor mais l’artiste ne perd rien de sa force de frappe.

Wasaru prouve à son tour que ses nouveaux penchants ne sont pas dus au hasard : bercé dans une culture underground où les guitares ont longtemps étaient au cœur de ses précédents projets, Wasaru tombe le masque et nous laisse y découvrir un visage sombre. Pour ce cinquième album en 10 ans, « Sadtimes » est clairement estampillé hip hop avec les nombreux MC’s se succédant au micro. En revanche, il s’agit du tout premier à sortir en format physique : Wasaru se professionnalise et la beauté de l’objet ne laisse pas insensible.

Wasaru s’offre un grand saut sans trembler

En proposant près de 14 compos, Wasaru n’a pas fait les choses à moitié et il a surtout choisi de ne pas partir seul dans cette nouvelle bataille : le beatmaker a partagé son panel créatif en ouvrant son univers à R3myboy pour le mixage et le mastering. Voguant aux côtés de Slawth, jeune MC américain, Wasaru frappe fort sur Sociophobe within. A la manière d’un Al’Tarba envoûté et terriblement pesant, on tient déjà deux brûlots prêts à se répandre comme une traînée de poudre… En tentant de se défaire de ses chaînes, la virée nous propulse en pleine jungle urbaine où Blurred foam sonne bien oldschool. Morceau à quatre voix, Cory Bugz, 211Joe, Slawth et Brwitten endossent sans trembler leur statut de maître de symphonie. Avec une part belle laissée aux claviers, le track donne le ton et se rapproche finalement le plus de ce que l’artiste proposait auparavant.

Le lillois laisse volontairement la brume envahir les ondes, So long en est le parfait exemple, les basses résonnent alors que le glas n’est pas loin de sonner : en compagnie de Nÿme sur un Séculaire (prolétaire), les scratches s’invitent pour une parade à contre-courant des mots et de la pensée dominante. En jonglant entre les maux d’une société au bord de l’abîme, la descente en enfer se poursuit : dans une fournaise où le métal se met subitement à frapper les murs, California se fracasse sur les rochers de la pensée.

« Sadtimes », voyage sans retour

Dans cette chaleur insoutenable, la lumière arrive pourtant à percer cette cage en acier : Two thousand thirteen, avec toujours Slawth au micro, propose une mélodie tapageuse, où la douceur se met à flirter avec la puissance du verbe. Le sublime Fantasy drop, avec les belles Tommy Jordan et Danielle Rose, provoque à la fois une étrange sensation de tristesse alors que le déchirement est proche. Rajoutez à cela un soupçon de Tricky, fièrement mené par le MC japonais Katagi, et vous aurez sans doute réveillé une colère divine.

Perdu dans la pénombre et les bas-fonds d’un monde qui se fissure de toute part, Wasaru a dévoilé une facette encore plus sombre de sa personne avec ce « Sadtimes ». En s’entourant d’une quinzaine d’artistes pour l’accompagner dans ses contrées lointaines, l’artiste dresse le portrait d’une société en détresse marquant à l’encre indélébile l’Homme. Un voyage sans retour où l’espoir n’attend que de renaître.

Clip « Sociophobe within » feat. Slawth

FICHE TECHNIQUE

Tracklist
1. Intro
2. Blurred foam
3. So long
4. Fantasy drop
5. Sociophobe within
6. Tokyo’s night view
7. Monuments
8. Take a hi(n)t
9. All across the sun
10. Two thousand thirteen
11. Séculaire
12. California
13. Change
14. Tricky

Sortie : 28 mars 2016
Durée : 49 min
Genres : Hip Hop / Trip Hop
Label : Wasaru

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