Rencontre avec Geoffrey Rabier, président du festival des Rocktambules de Rousson (partie 2/2)

15 min de lecture

Le festival des Rocktambules de Rousson fêtait sa 15e édition cette année. Avec Zebda et Mauresca Fracas Dub le vendredi soir puis Lofofora, Sidilarsen, Blankass et Kill The Young le lendemain, les Rocktambules ont encore attiré plus de 4 000 personnes cette année. Autour d’une bonne mousse, nous avons rencontré Geoffrey Rabier, président des Rocktambules, pour évoquer 15 ans de festivals, d’expérience, de ressentis, tout en gardant comme fil directeur cette édition anniversaire.

En déclinant l’interview en deux parties, cette seconde séquence aborde des questions relatives à l’évolution du festival et à des points plus personnels évoqués par Geoffrey Rabier. En ligne de mire, il sera aussi question du « mal gardois » en matière de culture. Hier, la première partie débutait à l’origine du festival pour finalement arriver à la 15e édition (bilan de l’année, choix de programmation, organisation, etc.).

Dimitri : Depuis 2 ans, les Rocktambules ont changé de formule en proposant une flopée de groupes locaux en guise d’ouverture avec des soirées qui commencent désormais vers 18h mais avec peu de monde. Est-ce judicieux ?

Geoffrey : J’ai un avis mitigé sur cette question.

Sur le fond, c’est une très bonne idée car cela permet à de nombreux groupes amateurs de pouvoir jouer sur une grande scène et face à un public plus conséquent qu’à l’accoutumée, mais est ce qu’on est dans la bonne région pour le faire ?

Geoffrey : Je ne sais pas. Je me pose des questions, et je ne suis pas le seul puisque cela revient régulièrement sur le tapis dans l’association. On a essayé ça l’année dernière, on a voulu le refaire cette année, mais honnêtement, je ne sais pas si l’on va le réitérer en 2013. Un festival ce n’est pas que des têtes d’affiches, c’est aussi des tremplins. On en fait à Montpellier, en Lozère, en Ardèche, cela nous permet de nous délocaliser… mais je ne sais pas si c’est judicieux.

Sachant que les gens bossent le vendredi et qu’ils arrivent plus ou moins tard sur le site, est ce qu’il ne faudra pas le maintenir que le samedi ?

Geoffrey : Ce sont des idées que nous avons dans les tiroirs, nous n’avons pas encore tranché là-dessus. Personnellement, je suis un fervent défenseur de cette idée des tremplins, je trouve que c’est hyper important pour des groupes amateurs de jouer sur une scène similaire à la notre. Je ne peux pas te répondre, on en parle régulièrement. On a 1 an devant nous pour se décider !

Est-ce que ça vous a déjà effleuré l’esprit de proposer une formule 3 soirs ? Avec par exemple un premier soir gratuit spécial tremplin puis 2 autres soirs payant…

Geoffrey : Oui, on y a déjà réfléchi. Après ce n’est pas réalisable. Cela engendre trop de contraintes et de frais supplémentaires. Puis même au-delà de ça, je me répète, on est dans une région tellement pauvre…

Cela me permet de faire une parenthèse : tu y es peut-être tombé dessus mais il y a 3 ans environ j’avais fait un dossier qui s’intitulait « La crise des festivals ? » qui soulignait la situation délicate de nombreux festivals français dont un focus sur plusieurs festivals de la région Languedoc Roussillon, on ne peut pas dire que nous soyons bien lotis rien qu’au niveau du département… Y’a-t-il un « mal gardois » en terme culturel ?

Geoffrey : La situation est désespérante. Je pense que c’est avant tout un problème de culture. C’est à se demander si les gardois ne préfèrent pas les taureaux à la musique ! Malheureusement je ne connais pas la réponse, et d’ailleurs ça m’arrangerait de la savoir pour faire évoluer le festival et ce qu’il y a aux alentours. Pourquoi pas lancer un abrivado au milieu du festival, peut-être qu’on ferait venir encore plus de monde (rires) !

Un toro-piscine aux Rocktambules l’année prochaine ? (rires)

Geoffrey : Non mais même moi j’aime bien les taureaux mais tu le vois, pour les férias, le monde colossal qui se déplace dans les rues… C’est culturel. Et d’ailleurs, c’est à croire que les festivités que retiennent les gardois durant l’été ce sont les fêtes de villages. Il y a une tous les week-end, tu vas là-bas pour faire l’apéro et basta. Alors ouais, on y va, mais d’un point de vue musical c’est le néant. Tu ne vas pas à la féria ou dans une fête de village pour la musique ! Ça se saurait !

Lofofora

Après tu sais ce n’est pas spécialement ce que le festivalier cherche… Les notions de proximité et de chaleur ne se retrouvent pas. Puis, beaucoup ont trouvé que l’Aluna n’était pas forcément adapté pour recevoir autant de monde, 20 000 personnes sur Manu Chao c’était limite irrespirable… Un festivalier qui s’interrogeait sur les mesures de sécurité de l’Aluna m’a demandé comment il parviendrait à évacuer cette masse de foule si un incident était à déplorer. Toi qui es président de festival, tu ne crains pas des mouvements de foule les soirs de grosses affluences ?

Geoffrey : On a eu un mouvement de foule parfaitement géré l’année où Massilia Sound System est venue. C’était la veille, le vendredi soir, sur Enhancer. On s’est pris un gros orage et la foudre est tombée sur la scène. Ca a provoqué un mouvement de panique, le concert a été arrêté, et je précise que nous avions trois issues de secours. Des gens se sont réfugiés dans les loges, certains étaient choqués et nous avons pu nous occuper d’eux.
Et je peux te dire que là, j’ai eu un coup de flip. Merde, j’organise un festival, je suis responsable, je n’ai pas envie qu’il y en ait un qui reste collé ! On a toujours été en règle, mais regarde en Belgique l’année dernière pour le festival Pukkelpop. Le roi de Belgique a peut-être gracié l’organisateur du festival, car peuchère certes il y est pour rien, l’évènement a été qualifié de catastrophe naturelle, mais il doit avoir ça dans un coin de sa tête. Il est certain que l’on est paré face à la pluie, au vent, etc, mais quand tu te prends une tornade sur le site, tu es impuissant. En tous cas, nous prenons nos précautions car il faut un minimum de cohérence et d’intelligence pour organiser un festival.

C’est certain… Enfin, la désormais classique question que je pose désormais à chaque fois : si tu devais résumer en un mot ton expérience à travers le festival des Rocktambules, ce serait quoi ?

Geoffrey : Arf. C’est une expérience collective à se lever le cul pour une cause, des barbecues avant de coller des affiches aux quatre coins de la région. Des méchantes soirées après avoir installé ces foutus barrières autour de Landas, c’est très dur de trouver les mots pour qualifier ça. Car on est un sacré noyau qui partageons cette passion autour de l’évènement. Il y a des coups de gueule mais aussi de la joie quand on voit notre champ qui est plein de monde… Je retiens avant tout la vie de l’association pour caractériser les Rocktambules. On arrive à fédérer des personnes qui habitent à Mende, en Ardèche, à Montpellier (elles se reconnaîtront) et je trouve ça fabuleux. On est une bande de connards, et tu peux le marquer ça ! Une bande de connards qui a comme objectif de monter un festival. Quand on rencontre des associations des départements alentours on nous dit parfois qu’on est un peu à l’arrache mais je vais te dire quelque chose, c’est comme ça qu’on est les meilleurs ! « A l’arrache », plus ou moins, bien entendu, sinon on n’en serait pas à notre 15e édition. Tout ce qui a besoin d’être hyper carré, c’est hyper carré sinon on se serait viandés.

Tu peux me qualifier ça en un mot ? J’ai déjà eu « merci », « funky »…

Geoffrey : C’est le bonheur d’être ensemble, ouais, « bonheur » pourrait bien être le mot qu’il faut ! Même si, bien sûr, « merci » marche très bien ! Aux bénévoles, aux artistes, aux spectateurs… Et je comprends que l’on puisse résumer ça en un « merci ». Mais on va dire que le « merci », on préfère le faire à notre manière, en interne (rires) !
Après, si je devais symboliser l’association en un mot, ce serait « convivialité ». Sans hésiter. Mais tu peux garder « bonheur » ! Quand on se retrouve, on se régale. Il ne faut pas oublier de rappeler que l’on travaille tous, nous ne sommes plus dans le milieu étudiant, il y a des pères de famille, etc !

L’année prochaine, tu seras encore à la tête du festival ?

Geoffrey : Déjà, il y aura une 16e édition. Après, est-ce-que je serais encore président ? Grande question. Le problème c’est que si je ne réponds pas là-dessus je vais me faire tailler dans l’association (rires) ! Déjà, l’année dernière, j’avais émis des doutes. Alors, là… J’ai envie de dire, on a tous laissé notre pâte sur le festival, un petit truc de différent. Et, les verres consignés, on peut dire que c’est ma pâte. Ce n’est pas que moi qui ait eu cette idée, mais quand on a découvert le concept, je me suis dit, pourquoi pas chez nous ? Alors, on verra… Ce qui est certain, c’est que même lorsque je ne serais plus président des Rocktambules, je viendrais tous les ans à Landas !

Propos recueillis par Dimitri L (alias Aïollywood) le 29 Juin 2012

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